Interpellation concernant la gestion des cas de maltraitance animale en Région de Bruxelles-Capitale

Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN Goidsenhoven, Député, adressé à Mme Bianca Debaets, Secrétaire d’Etat à la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de la Coopération au développement, de la Sécurité routière, de l’Informatique régionale et communale, de la Transition numérique, de l’Egalité des chances et du Bien-être animal,

Concernant « la gestion des cas de maltraitance animale en Région de Bruxelles-Capitale ».

 M. Gaëtan Van Goidsenhoven.- C’est avec une certaine satisfaction que j’ai pu prendre connaissance du compte rendu que les responsables de Gaia ont fait de leur première réunion de travail avec vous depuis votre désignation au poste de Secrétaire d’État en charge du Bien-être animal.

Cette problématique, aujourd’hui entre les mains des décideurs régionaux, relève pour notre Région d’un fabuleux défi. Il s’agit en effet de faire la démonstration que nos services régionaux pourront bel et bien agir efficacement pour que cessent les trop nombreux cas de souffrance animale via la sensibilisation, mais aussi l’indispensable répression des faits constatés.

La loi relative à la protection animale adoptée en août 1986 précise clairement que « toute personne qui détient un animal, qui en prend soin ou doit en prendre soin, doit prendre les mesures nécessaires afin de procurer à l’animal une alimentation, des soins et un logement qui convienne à sa nature, à ses besoins physiologiques et éthologiques, à son état de santé et à son degré de développement, d’adaptation ou de domestication. »

Cependant, tout l’enjeu est le suivant. Si je suis témoin d’un fait, un voisin qui ne soigne manifestement pas ses chiens, la présence d’un chat enfermé sans soins dans une maison, comment dois-je agir ? Auprès de qui dois-je le faire ? Et avec quelles chances de suivi efficace ? Voilà les questions que se posent de très nombreux Bruxellois sensibles à la cause animale.

À ce propos, j’ai pris bonne note de l’initiative de votre collègue wallon, M. Di Antonio, de proposer aux citoyens de remplir, via un site internet, un formulaire anonyme de dénonciation des cas de maltraitance. Ce projet pose question. Le caractère anonyme des dénonciations n’encourage-t-il pas les dénonciations calomnieuses ou, au contraire, permettra-t-il de rompre la loi du silence qui règne encore dans beaucoup de cas de maltraitance animale ?

Je souhaiterais que vous puissiez d’abord vous prononcer au sujet de cette initiative singulière, mais surtout nous préciser sous quelles formes et par quels moyens les citoyens bruxellois peuvent aussi de leur côté contacter vos services pour évoquer des situations problématiques.

Disposez-vous d’une équipe de professionnels rompus à cet exercice de récolte de plaintes ? Estil possible pour les plaignants de conserver l’anonymat ? Une campagne de sensibilisation et/ou d’information est-elle prévue dans de brefs délais ?

Cela me semble essentiel. Pour tout vous dire, je souhaite qu’à court terme, les coordonnées de contact de vos services puissent être diffusées notamment via les vétérinaires de quartier qui me semblent être de bons carrefours d’information en la matière.

Par ailleurs, après les plaintes, il s’agit d’en assurer le suivi c’est-à-dire de contrôler sur le terrain la véracité des faits dénoncés. Pourriez-vous davantage m’éclairer à propos de la capacité de vos services à assumer ces tâches ? Disposez-vous d’équipes en nombre suffisant, mais aussi parfaitement formées pour les éventuelles inspections à la suite des dénonciations de cas de maltraitance animale ?

Dans ce contexte, des collaborations sont-elles nouées avec les services de police et avec les communes bruxelloises ? En effet, les associations de protection animale encouragent à raison les citoyens témoins de situations infamantes à s’adresser aux services de police pour y déposer plainte.

Ceci exige de mieux travailler à la sensibilisation de nos policiers au sujet de la matière qui nous préoccupe aujourd’hui. En effet, le policier doit acter la plainte du témoin d’une situation de maltraitance et organiser le suivi. Il y a donc toute une procédure à mettre en branle lors de pareilles situations. Dans cette perspective, la Région joue désormais aussi un rôle moteur au sujet duquel je souhaite être plus parfaitement informé.

Sollicitez-vous l’aide d’experts extérieurs lors du suivi des plaintes – vétérinaires, ou membres d’associations spécialisées ? Si oui, lesquels et selon quel cadre juridique ?

En cette matière, notre Région est confrontée à un nouveau défi que nous devons impérativement relever. La crise économique à laquelle nos concitoyens sont confrontés, l’augmentation préoccupante de la pauvreté de nombreux ménages, le développement d’une société de consommation qui considère trop souvent l’animal comme une chose et non comme un être vivant à part entière sont autant d’éléments qui obligent les décideurs et tous les acteurs du secteur à faire montre d’une très grande détermination.

Vous le savez, les animaux sont bien souvent les premières victimes des mauvaises conditions socio-économiques de la population. J’espère que dans votre réponse vous nous indiquerez que votre politique s’articulera autour des maîtres mots suivants : sensibilisation, vigilance et fermeté lorsqu’il s’agira de combattre la souffrance animale.

Mme Bianca Debaets, secrétaire d’État.- Concernant le dépôt des plaintes, à l’heure actuelle toute négligence ou maltraitance d’animaux peut être signalée au SPF Santé Publique sécurité de la chaîne alimentaire et environnement, via le formulaire qui est en ligne sur leur site web.

Pour la Région bruxelloise, le système restera en place au terme de la période transitoire prévue pour le 31 décembre 2014. Le formulaire actuel oblige le dépositaire de la plainte à indiquer son nom et prénom, son adresse postale et électronique, tout en lui permettant de garder l’anonymat vis-à-vis du contrevenant dans le cadre du dossier d’inspection.

Par ailleurs, des cas de maltraitance animale peuvent toujours être signalés aux services de police. Mon objectif est donc de maintenir le système existant, le formulaire en ligne permettant de déposer sa plainte.

Une campagne sur un point de contact bruxellois de maltraitance animale n’est pas encore à l’ordre du jour. En revanche, je souhaite organiser une campagne de sensibilisation afin de rappeler aux propriétaires d’animaux domestiques leurs responsabilités par rapport à leurs animaux.

Nos refuges à Bruxelles sont saturés. Les chiffres en la matière sont alarmants, particulièrement concernant les chats : 30.000 chats recueillis dans les asiles dont beaucoup doivent être euthanasiés. Nous souhaitons vraiment éviter cela.

Je souhaite donc réduire le nombre d’animaux présents dans les refuges à l’aide d’une combinaison de mesures allant de la sensibilisation à la stérilisation, en particulier pour les chats.

Une demande a été formulée auprès des services ICT de Bruxelles Environnement pour pouvoir disposer, au terme de la période transitoire, du même type de formulaire de dépôt de plainte sur le site de Bruxelles Environnement. Selon les informations que nous avons à notre disposition, cette demande sera rencontrée.

En ce qui concerne l’équipe de terrain à disposition de Bruxelles Environnement, deux inspecteurs, vétérinaires de formation, seront transférés du SPF Santé Publique sécurité de la chaîne alimentaire et environnement.

Le premier inspecteur est une personne disposant d’une expérience de plus de dix ans en matière de bien-être animal, notamment en Région bruxelloise. Le second est une personne ayant été engagée au mois d’avril 2014 et qui travaille sur le territoire de la Région wallonne. Les deux inspecteurs ont véritablement choisi de s’investir en la matière.

Ces personnes se chargent dès aujourd’hui du suivi des dossiers de plaintes en cours et également des inspections obligatoires, comme les endroits où les animaux d’expériences sont élevés ou détenus ainsi que dans les abattoirs.

À la suite de la sixième réforme de l’État, nous nous trouvons encore dans une période transitoire au cours de laquelle des missions d’inspection doivent être réalisées au niveau fédéral, plus particulièrement par le SPF Santé Publique sécurité de la chaîne alimentaire et environnement et l’Afsca. La mise en œuvre de la compétence aura lieu au 1er janvier 2015 et passera officiellement à la Région bruxelloise.

Nous disposons donc de vétérinaires compétents qui procéderont aux inspections et Bruxelles Environnement négocie en ce moment un protocole de coopération avec l’Afsca, afin de pouvoir continuer à avoir recours à leur expérience après le 1er janvier 2015.

Ainsi, l’Afsca pourrait se charger des contrôles de l’abattoir d’Anderlecht de manière à ce que les deux inspecteurs de Bruxelles Environnement puissent se concentrer sur d’autres dossiers.

Cette répartition des tâches fait actuellement l’objet de discussions, mais je mettrai tout en œuvre pour permettre une collaboration permanente avec l’Afsca.

Sur le plan de l’expertise pour les inspections, aucun problème n’est attendu grâce aux deux inspecteurs et au protocole de coopération avec l’Afsca.

Je souhaite à nouveau intensifier la collaboration avec les communes sur cette question-ci afin d’élaborer une politique du bien-être des animaux.

En ma qualité de secrétaire d’État, j’ambitionne de promouvoir cette fonction en collaborant de la manière la plus constructive possible avec les communes. À la demande d’un certain nombre d’échevins, j’inviterai les autorités locales à une concertation et une collaboration autour de dossiers spécifiques. Par exemple, l’abattage, les animaux abandonnés, les pigeons, etc.

À la suite de la sixième réforme de l’État, nous créerons un conseil bruxellois pour le bien-être animal. À cette fin, mon administration lancera le travail préparatoire au début de l’année 2015. Ce conseil sera composé d’experts : vétérinaire, asbl qui travaillent dans le domaine, Gaia, les différentes administrations et, pourquoi pas, les communes. Ce conseil pourra formuler des avis sur des thèmes liés au bien-être animal. On recherchera des synergies et des échanges avec les autres Régions et les conseils que ces dernières vont probablement instituer.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven.- Je retiens que deux vétérinaires seront chargés des inspections de terrain. Je crains que ces deux personnes, même avec la meilleure volonté du monde, soient rapidement débordées par l’ampleur de la tâche, connaissant la situation en Région de Bruxelles-Capitale. La ministre considère-t-elle que cette toute petite équipe de deux inspecteurs intérimaires sera à même de répondre aux plaintes et de procéder aux inspections utiles sur le terrain ?

Vous avez également parlé d’intensifier les collaborations avec les communes et de créer un conseil bruxellois du bien-être animal, composé d’experts, de vétérinaires et d’asbl. Je voudrais insister sur le fait qu’il existe des asbl bruxelloises dans ce domaine. On parle beaucoup de Gaia, très active et médiatisée, mais d’autres possèdent aussi une expertise de longue date en matière d’animaux domestiques, comme l’asbl Veeweyde. Évitons de les considérer comme portion congrue.

De façon générale, il reste beaucoup de pain sur la planche. Il serait opportun d’agir le plus rapidement possible afin de ne pas nous laisser distancer par les deux autres Régions, en termes d’activisme, mais aussi de résultat.

Enfin, vous avez parlé d’une campagne de sensibilisation. Qu’est-il prévu dans ce cadre ? Quels en seront les contours ?

Mme Bianca Debaets, secrétaire d’État.- À ce stade, il n’est pas possible de prévoir si les deux vétérinaires suffiront, puisqu’il s’agit d’une nouvelle compétence pour la Région. Je vous prie de nous laisser le temps de mettre en œuvre ces nouvelles compétences. Dans quelques mois, nous pourrons alors procéder à une évaluation.

La collaboration avec l’Afsca s’avère également fondamentale dans la répartition des tâches. Je souscris par ailleurs à votre suggestion quant à une implication de l’asbl Veeweyde au conseil composé d’associations et de vétérinaires. Cette association peut se targuer en effet d’une longue expérience sur le territoire.

Enfin, l’objectif de la campagne que j’ai évoquée porte avant tout sur la sensibilisation des Bruxellois au respect des animaux. Le fait de posséder un animal implique des droits et des devoirs. Il ne s’agit pas de l’abandonner lorsqu’on part en vacances, mais bien de le nourrir et de le prendre en charge. Je songe notamment à la stérilisation des chats.

 

Pour retrouver le texte dans son intégralité, cliquez ici.
CRI COM (2014-2015) n°6, Novembre 20147, pp. 91-97