Interpellation jointe concernant la fermeture du tunnel Stéphanie

Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à M. Pascal SMET, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, chargé des Travaux publics et des Transports,

concernant la fermeture du tunnel Stéphanie

 

[Interpellation principale de Monsieur Paul Delva]

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Décidément, les informations et les révélations se bousculent, concernant le dossier des tunnels bruxellois ! L’évolution de cette actualité devient de plus en plus préoccupante, inquiétante même, à mesure que nous découvrons que la gestion de ces tunnels semble avoir été écartée de vos priorités en matière de mobilité.

Depuis hier, c’est désormais un rapport datant de 2013, décrivant la situation préoccupante et les défaillances sévères constatées depuis des années, qui fait la une de l’actualité.

Les tunnels bruxellois semblent poser de plus en plus de difficultés, au point de devoir procéder de façon inopinée à leur fermeture comme ce fut le cas pour le tunnel Stéphanie, le 11 janvier dernier. Cette interruption de trafic, annoncée par les médias pour une durée de quatre à cinq jours, était justifiée par le risque que des blocs de béton tombent sur la voirie, présentant un réel danger pour le trafic automobile.

Ce n’est pas uniquement le tunnel Léopold Il qui mérite une sérieuse cure de rénovation. Si l’on se réfère à vos récentes déclarations, M. le ministre, les tunnels Rogier et de la Porte de Hal présentent aussi des indices de dégradation qui requièrent un traitement en profondeur.

Cette fois, c’est le tunnel Stéphanie qui retient l’attention, alors qu’il avait déjà bénéficié d’une cure de rajeunissement il y a quelques années, laquelle se révèle insuffisante.

Manifestement, le gouvernement, perdu dans les méandres de ses contradictions, ne cesse d’accumuler les abandons dans le domaine de la mobilité.

En 2014, Bruxelles Mobilité découvre, après l’ouverture du chantier de rénovation du viaduc Reyers, des anomalies justifiant d’abandonner sa remise en état et de procéder à sa destruction. On assiste à la destruction pure et simple, sans accompagnement, d’une décision claire et précise d’aménagement visant à améliorer la mobilité dans cette zone. Pour couronner le tout, sous la législature 2004-2009, vous vous disiez décidé à aménager un tunnel sous la place Meiser, que vous appeliez, à raison, la « place Misère ». Aujourd’hui, nouveau recul du gouvernement : il n’y aura pas de tunnel sous la place Meiser.

Un autre point noir est le tunnel Léopold II, dont l’état de délabrement est bien connu de ce gouvernement et de celui qui l’a précédé. Aucune solution concrète de réhabilitation de l’ouvrage n’est avancée. Faut-il quasiment dix ans pour mettre fin à une situation bien connue de dangerosité de ce tunnel ?

Alors que vous nous annoncez, depuis plusieurs mois, une analyse complète de la situation des tunnels de la Région bruxelloise, le 11 janvier, un nouveau point noir est venu s’inscrire au palmarès de l’aggravation des conditions de mobilité dans la Région. La récente nouvelle d’une fermeture pour un an du tunnel Stéphanie, si elle se confirmait, serait réellement alarmante pour l’ensemble des activités de la Région et serait purement inacceptable.

Voilà un nouvel exemple de reculade qui ne peut perdurer sans envisager d’interventions menées dans l’urgence en faisant appel à des techniques modernes d’isolation et de renforcement de la paroi supérieure du tunnel. Il est impérieux que le gouvernement fasse preuve d’imagination et décide, dans l’urgence, des actions à mettre en chantier pour rétablir le trafic dans ce tunnel, dans les délais les plus courts.

La Région va-t-elle porter la lourde responsabilité d’être la championne de l’immobilisme au point de compromettre de façon irréversible les activités sur son territoire et de faire fuir les entreprises autant que les classes moyennes ? La lourde liste des problèmes va-t-elle s’arrêter ou faut-il encore redouter d’autres surprises ?

L’état du tunnel Stéphanie justifiant une interruption sans préavis du trafic n’a-t-il pas pu être évalué en temps utile pour permettre de prévenir des mesures pénalisantes pour le trafic comme la fermeture prolongée d’axes importants ?

La fermeture du tunnel Stéphanie pendant une année étant inacceptable, des aménagements particuliers faisant appel à des techniques modernes et performantes de renforcement de la structure actuelle permettant une remise en état dans des délais courts sont-ils exclus ? L’idée d’un grillage provisoire capable de retenir les chutes éventuelles de débris est-elle à écarter, en attendant la réfection définitive ?

Pourrait-on disposer d’une étude globale de l’état des tunnels bruxellois et d’un calendrier précis des mesures de rénovation et d’entretien préventif ?

Comment expliquez-vous que le rapport de 2013, faisant état de sévères défaillances pouvant porter atteinte à la sécurité des usagers dans son ensemble, ait été occulté ?

En conclusion, M. le ministre, nous entendons bien qu’au stade actuel, « il n’existe pas de majorité bruxelloise pour renoncer à l’utilisation des tunnels ». Ceci nous laisse songeurs quant au projet de ville porté par le gouvernement.

À l’heure actuelle, nous assistons à la mise en œuvre d’une ville subie par les citoyens et le monde économique. Quand donc pourrons-nous nous enorgueillir d’une ville choisie, capable de mettre un terme à l’évaporation de la classe moyenne et des entreprises ? Une ville réfléchie non seulement au cœur de quelques cabinets et de bureaux d’études, mais également, et bien davantage qu’aujourd’hui, dans l’enceinte de cette assemblée qui doit devenir le lieu où émergera, enfin, un véritable projet de ville concerté !

[Interpellation jointe de Monsieur Hervé DOYEN]

[Interpellation jointe de Monsieur Bruno DE LILLE]

[Interpellation jointe de Monsieur Marc LOEWENSTEIN]

[Intervention de Monsieur Boris DILLIES]

[Intervention de Monsieur Vincent DE WOLF]

[Intervention de Madame Caroline DESIR]

[Intervention de Madame Carla DEJONGHE]

[Intervention de Madame Céline DELFORGE]

[Intervention de Madame Cieltje VAN ACHTER]

[Intervention de Monsieur Jef VAN DAMME]

[Intervention de Madame Brigitte GROUWELS]

[Intervention de Monsieur Dominiek LOOTENS-STAEL]

[Intervention de Monsieur Youssef HANDICHI]

M. Pascal Smet, ministre (en néerlandais).- Bruxelles compte 25 tunnels, pour une longueur totale de 11km. Les plus anciens datent des années 50 et 60, les plus récents des années 70. Les deux plus récents sont le tunnel Léopold II (1986) et le tunnel OTAN (2012). Le plus ancien est le tunnel Stéphanie, qui a 60 ans.

En 1989, Bruxelles a hérité de la compétence des tunnels, qui ont presque tous été construits par les autorités fédérales.

Il y a des raisons sérieuses de penser que plusieurs tunnels n’ont pas été construits selon les règles de l’art à l’époque. Là-dessus se greffe un problème d’infiltration d’eau et l’absence de grands travaux structurels au cours des 30 dernières années.

Au cours des 27 dernières années, depuis la création de la Région, de nombreux travaux d’entretien ont été effectués. Conscient de l’importance de la sécurité des tunnels, j’ai créé un article budgétaire spécifiquement dédié à cette matière dans le budget 2008. Cela s’appelle mener une politique, M. De Wolf. (poursuivant en français)

L’art politique, M. De Wolf, c’est de prévoir les crédits d’engagement. Cela signifie que l’on prévoit les sommes que l’on autorisera l’administration à utiliser.

M. Pascal Smet, ministre.- Vous avez raison. Il faut les exécuter.

Faisons les calculs des montants alloués entre 2008 et 2016. (poursuivant en néerlandais)

À l’époque, un budget de presque 150 millions d’euros était mis à disposition pour les travaux de rénovation, d’entretien, de réparation et de limitation du risque d’incendie dans les tunnels. (poursuivant en français)

La question de la gestion des tunnels doit être posée. Le gestionnaire des tunnels est l’administration, qui a donc pour responsabilité de prendre toute mesure utile, y compris la fermeture. La décision de fermer un tunnel n’est donc pas un acte politique, mais un acte administratif. C’est seulement après les trois premiers jours de fermeture que le gouvernement confirme la fermeture d’un tunnel pour le transformer en règle.

Encore récemment, en novembre 2015, suite à quelques remous dans la presse, j’ai clairement exposé à l’administration, au nom du gouvernement, que la sécurité des automobilistes était primordiale, nonobstant les effets sur la mobilité. C’est la sécurité des usagers qui doit guider les choix de l’administration.

Certes, on peut questionner le fonctionnement de l’administration, mais elle compte de très bons fonctionnaires et des travailleurs acharnés. En 2006, j’ai fait procéder à un audit de l’administration régionale, et en 2007, j’ai réalisé une réforme approfondie de Bruxelles Mobilité. Depuis 2007, j’ai créé en son sein une cellule dédiée aux tunnels. Des ingénieurs civils et industriels spécialisés y ont été engagés.

Sous la direction du directeur de Bruxelles Mobilité, un groupe de travail permanent pour les tunnels existe depuis novembre 2014.

En outre, depuis début 2015, un centre de crise pour les tunnels a vu le jour au sein de Bruxelles Mobilité. Composé d’experts, il est chargé de la gestion de chaque fermeture.

Depuis quelques mois, Bruxelles Mobilité dispose également d’un manuel interne pour la gestion des tunnels. Depuis la mi-2015, un coordinateur de chantier a été désigné afin de planifier et de grouper tous les chantiers liés aux tunnels, en enregistrant le moins de retard possible.

Dans les prochains jours, nous allons renforcer l’administration avec sept ingénieurs spécialisés dans ce domaine. Un chasseur de têtes a pour mission de trouver un ingénieur qui sera le project manager chargé des tunnels.

Beaucoup de questions ont également porté sur les inspections. Il s’agit de distinguer deux types d’inspections : les contrôles systématiques et les contrôles ad hoc en cas d’incident. Après chaque inspection, un rapport est rédigé, ainsi que des recommandations pour corriger les défauts constatés.

Jusqu’en 2015, pour procéder à ces inspections, la Région dépensait mensuellement 160.000 euros, hors TVA. À partir de 2016, ce montant, M. Delva, sera relevé à 310.000 euros par mois.

La partie visible du tunnel fait l’objet d’inspections visuelles. En cas de défaut, un contrôle manuel poussé est réalisé avec un marteau afin de déceler les dégradations du béton ainsi que les espaces creux et enlever ainsi les éventuels morceaux détachés.

Des contrôles systématiques avaient lieu par le passé. De 1999 à 2001, une campagne d’inspection de l’ensemble des tunnels bruxellois aurait eu lieu. Il serait intéressant de savoir ce qui a été fait à l’époque.

En 2008, j’ai donné ordre à l’administration de procéder à un contrôle et un diagnostic systématiques de tous les tunnels en vue de la rédaction du plan directeur relatif aux tunnels.

En 2005, lors de mon premier mandat, j’ai signalé au parlement que, durant les dix années écoulées, on n’avait pas assez investi dans la sécurité des tunnels. Depuis cette époque, je n’ai cessé de constater qu’il fallait avoir une vision complète et actualisée de la situation, pour pouvoir planifier les travaux dans une ville-Région qui compte de nombreux tunnels. Il faut déterminer les priorités en fonction des difficultés rencontrées. C’est pourquoi, en 2008, j’ai donné à l’administration la mission de faire un diagnostic systématique de tous les tunnels.

À la suite des deux incidents survenus au cours de mon actuel mandat, il me semblait primordial d’actualiser l’inspection de 2010 et de lancer le plan directeur relatif aux tunnels. En novembre 2015, au nom du gouvernement, j’ai ainsi donné ordre à l’administration d’inspecter – visuellement et manuellement – tous les tunnels bruxellois. Cela s’est fait de novembre 2015 à février 2016, en trois mois, et non un an et demi, comme ce fut le cas par le passé. Le rapport d’inspection de début 2011 a donc pu être actualisé, et nous pouvons élaborer un programme d’investissement pour les tunnels. Un programme est un progrès par rapport à un plan, et l’ensemble du gouvernement me suit en la matière.

Par ailleurs, de nombreux contrôles ont lieu au pied levé à la suite d’irrégularités ou d’incidents dans les tunnels. Toutes ces inspections réalisées depuis novembre 2015, sont encadrées par un bureau certifié et le bureau externe SECO.

Le diagnostic technique des tunnels passe aussi par l’électromécanique. En novembre 2015, J’ai donc demandé à l’administration d’effectuer un diagnostic technique de tous les équipements électromécaniques de nos tunnels. Le contrat de service est, depuis, conclu.

En outre, depuis 2015, Bruxelles Mobilité, la police et le Service d’incendie et d’aide médicale urgente (Siamu) effectuent des visites conjointes de tous les tunnels bruxellois. Toutes ces inspections ont mené à un rapport que je transmets maintenant au président du parlement. Je regrette que ces informations aient filtré par la presse car mon intention était de les livrer au président de notre parlement. Ce gouvernement veut continuer à travailler dans la transparence. 

Si vous ne disposez pas des notes, vous connaissez, en revanche, le contenu de la décision.

Lors de l’inspection, les endroits d’où les morceaux se sont détachés ou étaient sur le point de se détacher ont été décapés. Des filets de protection ont été installés aux endroits recommandés par le bureau d’étude.

Le 26 janvier 2016, nous avons reçu le rapport de synthèse du bureau SECO qui a assuré le suivi des inspections de l’état physique de construction. Sur la base de ce rapport, le directeur général de Bruxelles Mobilité a fait savoir au gouvernement que le risque présent était suffisamment maîtrisé pour garder les tunnels ouverts, à l’exception du tunnel Stéphanie. Toutefois, les recommandations formulées par SECO doivent être appliquées sans délai dans cinq tunnels. Un bureau spécialisé doit évaluer la stabilité des tunnels George-Henri, Montgomery, Tervueren, Trône et Reyers. Un rapport mensuel de suivi sera transmis au gouvernement.

Nous allons rédiger un programme pluriannuel d’investissements qui sera réactualisé sur la base du plan directeur disponible en mars 2016. Les chantiers prioritaires y seront définis en fonction des urgences.

L’état déplorable du tunnel Léopold II, qui n’a que trente ans, est probablement dû à des problèmes de conception et à une mauvaise estimation de l’impact de l’infiltration des eaux souterraines. De plus, des problèmes ont surgi durant les travaux au niveau de l’étanchéité, des joints de construction et de la composition du béton. Une détérioration accélérée a été constatée, qui est due à l’attaque chimique des gaz d’échappement. Le trafic a considérablement augmenté depuis la mise en service du tunnel. Le système de ventilation et d’éclairage a été remplacé avec retard. À tout cela, il convient d’ajouter les limites inhérentes à l’inspection visuelle.

La rénovation du tunnel Léopold II a effectivement fait l’objet de longues discussions, mais le gouvernement actuel vient de donner son approbation finale au programme de rénovation, ainsi qu’au cadre général de gestion de la mobilité durant les travaux.

Nous avons opté pour un partenariat public-privé (PPP), basé sur un contrat DBFM (Design, Build, Finance, Maintain), stipulant que l’entretien est confié à un partenaire privé.

Le cahier spécial des charges est terminé à 90% et l’appel d’offres peut être lancé.

En 2015, 1.500 échantillons de béton ont été prélevés, qui sont en cours d’analyse. Il est très probable que l’étanchéité du tunnel Léopold II doive être refaite sur toute sa longueur, comme c’est le cas pour le tunnel Rogier. Nous avons déjà beaucoup investi dans ce tunnel au cours des derniers 18 mois.

Le tunnel Stéphanie fait partie du complexe de tunnels Stéphanie-Louise. Il se situe au niveau -2, tandis que le tunnel Louise est au niveau -1. Les tunnels se croisent sur une intersection de 16 mètres sur 16. Les tunnels de métro, à côté, datent des années 1980 et ont été construits au moyen d’autres techniques. Le tunnel Stéphanie date, lui, de 1957 et se compose d’une entrée, d’une section nord de 150m et d’une section sud, dont le béton est en meilleur état. L’entrée a, quant à elle, été totalement rénovée entre 2006 et 2008.

Grâce à la décision qu’a prise en novembre ce gouvernement d’actualiser, à l’aide d’un laser, l’inspection de 2010, on a pu découvrir dans le tunnel Stéphanie un important problème de stabilité qui nous a contraints à sa fermeture. Lors de l’enlèvement de la dalle de couverture et de la membrane, un morceau de béton de taille considérable est tombé. La zone a donc dû être décapée. Le bureau de contrôle technique pour la construction SECO a mis les travaux à l’arrêt, fait fermer le tunnel et demandé à un bureau d’études spécialisé français, Egis, de procéder à une étude de stabilité.

Le plafond du tronçon nord est en mauvais état, causant un risque de perte de stabilité sur 150 mètres. Le béton armé de ce plafond est rouillé et se dilate, ce qui explique la fermeture du tunnel. Je reviendrai sur une éventuelle ouverture temporaire. Toute la zone nord est sous surveillance permanente, en particulier l’intersection entre Louise et Stéphanie. Pour ouvrir le tronçon nord, des travaux de rénovation en profondeur doivent être entrepris.

J’ai entendu certains dire que la fermeture du tunnel Stéphanie était un prétexte à la volonté d’une fermeture générale des tunnels. C’est ridicule ! Ce tunnel est en mauvais état et la seule motivation de sa fermeture est d’assurer la sécurité des automobilistes.

Bruxelles Mobilité a estimé la durée des travaux à un an :

– études liées à l’état du béton et à l’étanchéité ;

– établissement des plans ;

– obtention éventuelle d’un permis de construire ;

– adjudication du chantier ;

– réalisation des travaux.

Toutefois, avant même la demande du bourgmestre de la Ville de Bruxelles, nous avions déjà demandé à Bruxelles Mobilité et à Egis d’analyser la faisabilité de rouvrir le tunnel durant la phase d’étude, avec des conditions de sécurité évidentes. Cette étude fournira normalement une réponse décisive au début de la semaine prochaine. Le gouvernement devrait alors être en possession de tous les éléments nécessaires pour savoir si une réouverture est techniquement possible ou non. Seront également pris en compte les coûts engendrés et la manière dont cette réouverture doit être opérée.

Soyez assurés que le gouvernement est déterminé à rouvrir temporairement le tunnel Stéphanie dans la mesure du possible. Une fois les permis et plans disponibles et les démarches administratives finalisées, il faudra évidemment le refermer afin de procéder aux travaux de rénovation de cette partie du tunnel. Mais c’est tout le complexe Louise Stéphanie qui doit être refait, comme le démontre le rapport de SECO.

Par ailleurs, mission a été donnée à Bruxelles Mobilité d’établir un plan de mobilité avec les communes concernées, les zones de police, la STIB et un bureau externe. Plusieurs réunions ont eu lieu cette semaine et nous sommes presque parvenus à un accord avec les trois communes et les autres partenaires. Nous pouvons donc pratiquement confirmer aujourd’hui ce plan de mobilité et le mettre en œuvre dans les heures à venir.

Pendant la fermeture du tunnel Stéphanie, doit-on rouvrir le piétonnier et les boulevards du centre ? Il s’agit d’une autre zone de la capitale. Le trafic qui se trouve en difficulté dans le quartier Louise n’est pas le même que celui des boulevards du centre. Je pense en outre qu’une telle réouverture n’est pas une bonne idée. Les deux ne sont pas liés et il n’est aucunement question de remettre en cause l’opinion du bourgmestre de la Ville de Bruxelles.

Pour répondre à la question portant sur les causes de l’état actuel du tunnel Stéphanie, je vais vous citer littéralement une partie du rapport : « Les dégradations identifiées affectent des zones étendues et sont profondes et sérieuses. Elles résultent très probablement, d’une part, de faiblesses de construction (faible enrobage utilisé à l’époque, béton peu résistant aux agressions, peut- être mal formulé et vraisemblablement mal mis en œuvre) et, d’autre part, d’un lessivage progressif en profondeur dû à des ruissellements résultant eux-mêmes de problèmes d’étanchéité de longue date ».

Ceux qui pensent qu’on a dû fermer le tunnel Stéphanie en raison de l’insuffisance de travaux d’entretien ces derniers mois se trompent complètement. Je leur conseille de bien lire le rapport et d’examiner les conclusions des experts externes.

M. le président, beaucoup de questions sont posées sur le financement de toutes ces rénovations. Aujourd’hui, Bruxelles Mobilité, sur la base des résultats actuels, estime le coût de la rénovation à 523 millions d’euros au minimum. J’ai entendu certains prétendre que ce montant n’avait pas été objectivé. C’est faux. Des tableaux reprennent les investissements tunnel par tunnel. Les chiffres sont actualisés. Aujourd’hui, même s’ils ne constituent qu’une indication, ils avoisinent les 523 millions d’euros. Il s’agit d’un montant provisoire, mais qui va s’étaler sur plusieurs années. Nous ne devrons pas injecter tout l’argent en un an.

Le gouvernement n’a pas encore pris de décision concernant le mode de financement de la rénovation. M. De Lille, il faut écouter ce que les membres du gouvernement disent et ils disent tous la même chose.

Je vais vous le rappeler : trois possibilités existent, avec des variantes.

Premièrement, le gouvernement bruxellois prend la rénovation à son compte.

Deuxièmement, la Région procède à un partenariat public-privé (PPP) et paie annuellement une indemnité de disponibilité à une société privée.

Troisièmement, la Région procède à un PPP déconsolidé, où plusieurs pistes seront étudiées sur la manière de faire contribuer l’ensemble des usagers. Dans le cadre d’un PPP déconsolidé, c’est au partenaire privé de supporter le risque.

Pour le tunnel Léopold II, le gouvernement a pris une décision de principe en faveur d’un tel PPP déconsolidé.

J’ai déjà expliqué plusieurs fois le coût de la rénovation du tunnel Léopold II. On lit des chiffres variables, parfois on parle de 660 millions d’euros, mais nous n’avons jamais évoqué de telles sommes. L’estimation a toujours été de 150 millions d’euros. Si l’étanchéité en surface doit être refaite, il faut y ajouter 30 millions.

Avec le ministre du Budget et le ministre-président, nous travaillons avec un bureau de consultance pour envisager les scénarios possibles. Nous n’avons pas attendu cette crise. Nous avons eu une réunion cette semaine avec le Banque européenne d’investissement (BEI), pas pour emprunter, mais pour collaborer étroitement afin de développer le mode de financement des travaux. C’est très important, car la BEI est prête à aider Bruxelles et l’assister pour déconsolider les budgets.

Notre gouvernement était surpris d’entendre récemment certains représentants des Régions, principalement la Flandre, dire qu’ils ne voulaient pas participer aux frais. Or, aucun membre du gouvernement bruxellois n’a demandé à la Flandre ou à la Wallonie d’intervenir !

Nous avons été agréablement surpris, après le Comité de concertation, des propositions constructives du ministre Reynders même si elles doivent être clarifiées. Il propose 50 millions pour le métro. Mais un nouveau métro, ce n’est pas seulement construire une nouvelle ligne. J’ai gentiment expliqué aux représentants des autres gouvernements présents à la réunion qu’un kilomètre de métro coûtait 150 millions d’euros. L’argent fédéral permettra de construire 300 mètres de métro par an.

Est-ce de l’argent supplémentaire ? Le fonds Beliris doit servir pour la mobilité, mais aussi pour d’autres projets tout aussi importants pour notre Région. Ces 50 millions vont être utilisés pour creuser une nouvelle ligne de métro, mais aussi pour la modernisation du métro, puisque nous allons devoir complètement en changer la signalétique, ce qui va coûter de l’argent. Si nous ne le faisons pas, il ne roulera plus. Nous voulons donc anticiper ce problème. Il faut clarifier ce budget émanant du niveau fédéral, car les 50 millions sont déjà dépensés pour des travaux nécessaires. Nous sommes ouverts au débat.

Beaucoup d’intervenants ont parlé, à juste titre, de l’avenir des tunnels. Il s’agit d’une question cruciale pour le gouvernement. Dans l’accord de gouvernement, peut-être pour la première fois depuis longtemps, se trouve un changement de paradigme. Nous avons opté pour la qualité de vie des habitants et des navetteurs. C’est pourquoi la qualité de l’air est très importante. Nous voulons développer nos politiques au départ de ce choix.

Nous ne voulons plus d’une ville où tout est fait pour la voiture. Nous ne sommes pas contre la voiture, mais il faut que ce soit équilibré. La démolition du viaduc Reyers, trop vétuste, est un premier pas, ainsi que les zones piétonnes, de nouveaux squares, etc. Et le lobby des voitures n’est pas content. Une partie de ce lobby essaye de transformer le débat en disant que nous sommes contre la voiture. Nous sommes plutôt pour la vie !

Dans toutes les villes européennes, la tendance est à la fermeture de certains types de tunnels. Il ne faut pas le nier. Nous voulons seulement garder les tunnels qui améliorent la qualité de vie des habitants. Le gouvernement va ouvrir un débat sur l’avenir des tunnels dans cette ville, mais aussi sur la mobilité dans son ensemble. Je n’ai pas connaissance d’études de Bruxelles Mobilité sur ce sujet. 

Le gouvernement veut être clair : il n’est pas à l’ordre du jour de fermer les tunnels bruxellois. Pour ce faire, il aurait fallu préparer ce dossier pendant plusieurs années, et ça n’a pas été le cas. Nous ne pouvons pas, d’un jour à l’autre, fermer ces tunnels sans proposer d’alternatives crédibles ou une stratégie qui tienne la route.

Rénover les tunnels, ce n’est pas gaspiller de l’argent. Car, même si l’on décide, dix ou quinze ans plus tard, de fermer un tunnel qu’on a rénové, on peut toujours le transformer en parking souterrain public.

Cela dit, ce n’est pas si simple de fermer un tunnel. Toute transformation, quelle qu’elle soit, suppose des travaux.

Vous pouvez aller dire en Flandre que le gouvernement bruxellois n’a pas l’intention de fermer les tunnels, mais de les rénover. Toutefois, des tunnels seront bel et bien fermés à plus longue échéance.

Des alternatives sont, en effet, nécessaires pour modifier notre mode de fonctionnement, et le gouvernement bruxellois n’a pas attendu cette crise pour changer de cap. Nous avons programmé la réalisation de 80km de pistes cyclables séparées d’ici à 2020 et avons récemment financé trois demandes de permis d’urbanisme à cet effet. À titre d’exemple, une piste cyclable est en cours de création dans l’allée Verte.

Oui, M. Handichi, nous devons développer le transport public, et sachez que ce gouvernement a consenti à un programme de 5,2 milliards d’euros d’investissement dans le transport en commun, sur une période de dix ans. Nous sommes la seule Région de Belgique – et ne parlons même pas du niveau fédéral qui ne pense qu’à faire des économies – à encore investir dans ce domaine : nous allons moderniser le métro, créer de nouvelles lignes de métro et de tram, avancer les travaux sur le plateau du Heysel et construire un nouveau terminus de trams pour le projet Neo et le parking de transit. Nous allons également acheter de nouvelles rames de métro et de trams, ainsi que de nouveaux bus. Enfin, il y a quelques mois, le gouvernement a décidé de créer 8.500 places de parking de dissuasion d’ici à 2021 et de mettre sur pied un système de téléjalonnement.

Toutefois, la Région bruxelloise ne pourra pas régler seule les problèmes de mobilité. Il est facile d’affirmer qu’elle ne les gère pas, de la culpabiliser et de l’accuser. Mais savez-vous que 40 à 45% des Bruxellois ne possèdent pas de voiture ? Tous les jours, 400.000 navetteurs viennent à Bruxelles – et c’est heureux – mais le drame réside dans le fait que 250.000 d’entre eux le font avec leur véhicule privé.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la société IBM – que l’on ne peut pas considérer comme appartenant aux lobbies anti-voiture ou à des mouvements idéalistes de gauche – soulèvent trois sources de problèmes de mobilité à Bruxelles :

– la fiscalité fédérale qui encourage d’habiter en dehors de la ville : la vie est moins chère à la campagne, le revenu cadastral y est beaucoup moins élevé qu’en ville, et l’on rembourse les frais liés aux déplacements entre le domicile et le lieu de travail. La politique fiscale fédérale renforce donc un sentiment anti-urbain, chez les Flamands comme chez les Wallons, il faut le reconnaître ; 

– la politique fédérale qui stimule le principe de la voiture de société. Les quinze experts mondiaux d’IBM que j’ai rencontrés n’en revenaient pas : quatre milliards d’euros pour les voitures de société et seulement un milliard d’euros pour la SNCB !

– la politique fédérale des 20 dernières années de tous les partis, y compris du mien, n’a pas réussi à mettre en place le RER : le « réseau éternellement retardé ». Le nom est entretemps devenu S-Bahn, mais le problème n’est pas encore résolu. En 2017, nous avons une échéance très importante. Suite au dialogue de notre gouvernement avec Mme Galand qui, sur ce point, fut constructif, en 2017, sachant que 80% de l’infrastructure du RER sera réalisée, nous prévoyons quatre trains par heure pendant les heures de pointe sur le réseau existant. Dès que le gouvernement fédéral aura approuvé cela, Bruxelles comptera beaucoup moins de voitures. 

[Intervention de Monsieur Vincent DE WOLF]

M. Pascal Smet, ministre.- Oui ! Nous menons effectivement un dialogue constructif et l’échéance est fixée à 2017.

J’adresse ce message au premier ministre : Bruxelles a besoin de l’État fédéral, pas tant pour l’argent que pour une collaboration active.

Au Comité de concertation, M. Bourgeois pleure pour que la Région installe des parkings de dissuasion autour de Bruxelles, qui soient connectés au tram et au métro. Mais, cette semaine, la commune flamande de Drogenbos organise ellemême l’opposition au parking de dissuasion que nous voulons installer à Uccle-Stalle !

On nous demande d’aménager le métro. Très bien, mais alors il faut nous autoriser à l’étendre jusqu’à Grand-Bigard et à construire un large parking de dissuasion le long de l’autoroute, qui soit relié au métro. Et la Flandre doit accepter que le métro bruxellois s’étende jusqu’au territoire flamand !

Un élément ne cesse de m’étonner : les quatre ministres de la Mobilité de ce pays ne se sont jamais réunis au cours de cette législature. C’est au tour de la Flandre de prendre l’initiative des convocations. Si M. Ben Weyts tarde à le faire, nous organiserons nous-mêmes une réunion pour développer une stratégie commune constructive pour les navetteurs, les Bruxellois et tous les habitants du pays.

Le gouvernement bruxellois a une idée très claire de la mobilité. Nous devons admettre que la crise des tunnels est mauvaise pour l’image de Bruxelles et pour notre institution. Mais n’allons pas nous imaginer non plus que nous sommes les seuls au monde à affronter de tels problèmes. New York, Montréal ou Paris ont connu et connaissent encore des problèmes similaires. Cela ne rend pas notre situation moins grave, mais cela relativise sa singularité.

Ce gouvernement doit et va trouver une solution. C’est au parlement bruxellois d’établir les faits pas au gouvernement. Le gouvernement bruxellois doit résoudre les problèmes. C’est ce à quoi nous nous sommes attelés dès notre entrée en fonction et nous continuerons à le faire inlassablement en unissant nos forces dans les semaines, mois et années à venir.

M. le président, we will fix it !

[Intervention de Monsieur Paul DELVA]

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Nous avons écouté avec beaucoup d’attention le ministre ainsi que Mme Grouwels. Nous analyserons ces déclarations, puisqu’il en résulte que, contrairement à ce qui avait été avancé, le gouvernement avait connaissance des éléments du rapport sortis en mars 2013. Cela pose question.

M. De Wolf a souligné que durant cinq années, 22 millions de crédits d’engagement annuels n’ont pas été engagés. Cela pose problème, car cela démontre qu’on n’a pas fait tout ce qu’il fallait. En 2015, sur 30 millions d’euros de crédits d’engagement, seuls 20 millions ont été mis en œuvre. Le ministre, à demi-mot, met en cause l’administration. L’engagement, en plus, de sept ingénieurs spécialisés laisse à croire qu’il y a des déficiences en termes de capacités à suivre ces dossiers.

Selon vous, les tunnels qui améliorent la vie des Bruxellois seront préservés. Cela implique qu’un certain nombre ne devraient pas l’être. Il faudra un jour clarifier cette position. Quels tunnels seront-ils fermés, pourquoi, et quand ? Ces questions sont légitimes.

Selon vous, 45% des ménages bruxellois n’ont pas de voiture. Les derniers chiffres en notre possession annonçaient plutôt 35%.

Je tiens aussi à souligner que, à la fin 2017, nous en serons à 90% du réseau RER suburbain.

A-t-on fait tout ce qu’il fallait pour que ces tunnels puissent fonctionner ? Je ne pense pas qu’on puisse l’affirmer. Fera-t-on tout ce qui est nécessaire pour remédier à la situation ? C’est votre défi, ainsi que celui de toute la Région. Nous espérons que, de ce côté-là, la mobilisation sera totale, et que nous aurons accès avant les médias aux informations nécessaires pour mener le travail parlementaire. 

[Intervention de Monsieur Hervé DOYEN]

[Intervention de Monsieur Bruno DE LILLE]

[Intervention de Monsieur Marc LOEWENSTEIN]

 

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CRI n°22 (2015-2016), Janvier 2016, pp. 24-98