Interpellation sur le premier bilan de la COCOF dans la stratégie 2025 pour redynamiser l’économie bruxelloise

Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à Monsieur Didier GOSUIN, Ministre du Collège de la Commission communautaire française, en charge de la Formation professionnelle

concernant le premier bilan de la COCOF dans la stratégie 2025 pour redynamiser l’économie bruxelloise

et concernant les nouveaux incitants pour la formation en alternance

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- J’avais effectivement déposé à la fois une interpellation à la ministre-présidente et une interpellation au ministre Didier Gosuin. On m’a invité de faire la synthèse des deux, ce que je vais m’efforcer de faire.

Il y a un an exactement, le 16 juin 2015, la ministre-présidente et le ministre en charge de la Formation professionnelle étaient les signataires, avec leurs collègues du gouvernement régional, de la Stratégie 2025, destinée à redynamiser l’économie bruxelloise. La Commission communautaire française était ainsi associée à ce plan global, transversal aux niveaux de pouvoir, au travers de plusieurs objectifs, axés notamment sur le renforcement de la formation professionnelle, le renforcement des politiques croisées emploi-formation, la mise en œuvre de la garantie pour la jeunesse ou encore la promotion de l’enseignement.

Lors de la présentation de cette stratégie, la ministre-présidente avait dit que le maître mot était le décloisonnement. La Région et les Commissions communautaires allaient s’y investir.

Un an après, il me semble opportun de dresser un premier bilan de ces investissements. L’axe 2 de cette stratégie divisée en 8 objectifs se concentre sur les engagements de la Région et des Commissions communautaires. Plusieurs chantiers ont donc été annoncés et je souhaiterais prendre connaissance d’un premier bilan de la mise en œuvre de ces derniers.

Quels sont les premiers résultats que vous pouvez nous communiquer, que ce soit d’un point de vue qualitatif ou quantitatif ?

Quel premier bilan tirez-vous de l’accord de coopération conclu entre les deux Commissions communautaires ?

Concernant la mise en place de la garantie pour la jeunesse, il a été affirmé la volonté de mettre en place cette mission incombant à la Commission communautaire française, soit une offre de service citoyen. Elle devrait être régulièrement évaluée dans le cadre du chantier éducation et formation informelle.

Pouvez-vous m’indiquer où en est ce processus ? Des évaluations ont-elles été effectuées ? Quelles en sont les premières tendances ?

Dans le cadre du renforcement de l’apprentissage des langues, quelles structures ont-elles été mises en place ? Quels en sont les premiers résultats ?

Toujours concernant le chapitre enseignement, le gouvernement et particulièrement la ministre-présidente affichait la volonté d’encourager l’embauche d’enseignants dans les écoles techniques et professionnelles. Quels chiffres pouvez-vous nous communiquer à ce propos ?

La ministre-présidente avait, l’année dernière, lors de son intervention, souligné participer activement aux actions liées à l’enseignement comme le suivi de l’offre de la demande scolaire, l’harmonisation de cette offre, les formations en alternance ou encore les stages de l’enseignement de plein exercice. Quelles premières conclusions peut-on tirer des participations actives à ces actions ?

Plus particulièrement en ce qui concerne vos compétences de ministre de la formation professionnelle, quel est le cadre du renforcement de la formation professionnelle ? Pouvez-vous nous donner un aperçu de l’évolution du plan quinquennal de formation ? Où en est-on dans le renforcement des politiques croisées emploi-formation ? Quel est le premier bilan du rapprochement entre les institutions bruxelloises en ce sens ?

J’avais également noté votre volonté d’approfondir la coopération interrégionale via la mise en place d’une communauté métropolitaine. Avez-vous pu, comme vous l’annonciez, organiser une concertation avec les représentants des organisations patronales et syndicales actives à Bruxelles ? Par rapport à cette ambition, quels sont les éventuels résultats de cette concertation ?

Je souhaite également profiter de mon temps de parole pour vous interpeller sur les nouveaux incitants à la formation en alternance.

Cela ne vous aura certainement pas échappé, votre homologue wallonne, Mme Tillieux, s’est récemment exprimée dans la presse à ce propos. Ce système, qui fait partie des priorités du gouvernement pour lutter contre le chômage touchant la Région, s’inspire notamment de ceux en vigueur dans des pays comme l’Allemagne ou la Suisse. Vous vous y êtes d’ailleurs rendu il y a un peu plus d’un an et vous y étiez en bonne compagnie puisque, outre la ministre wallonne de la Formation, le souverain était du voyage.

Les deux pays que je viens de citer connaissent des résultats encourageants dans le domaine de la formation en alternance grâce à la participation d’entreprises susceptibles d’accueillir des stagiaires.

Afin d’encourager les entreprises wallonnes à développer ce type de formation et en vue de simplifier le système existant, votre collègue wallonne a mis en place un nouveau système reposant sur quatre piliers incitatifs.

Le premier s’adresse à l’opérateur de formation et vise à soutenir et à améliorer l’encadrement de la jeunesse. Le deuxième concerne l’entreprise qui percevra le montant à l’issue de la première année de formation du jeune. Le troisième incitant est destiné à l’indépendant et encourage les petites entreprises à conclure un contrat d’alternance avec un apprenant. Enfin, le quatrième incitant s’adresse au jeune et entend le motiver afin qu’il aille au bout de sa formation.

Monsieur le ministre, qu’en est-il de ces incitants en Région bruxelloise ? Quelle réflexion menez-vous en la matière ? Avez-vous noué des contacts avec les divers acteurs de la Région bruxelloise (entreprises, PME ou très petites entreprises (TPE), indépendants, …) afin de discuter de la faisabilité du projet ? Avez-vous procédé à une estimation budgétaire de l’application de ces incitants à Bruxelles ?

J’évoquerai enfin une réunion qui s’est tenue le 25 mai dernier entre les ministres de l’emploi des trois Régions et le Roi Philippe, consacrée à cette même thématique. Pouvez-vous m’indiquez les principaux enseignements qui ont été tirés de cette rencontre ? Quelles sont les décisions concrètes qui ont été prises ? Avez-vous pu identifier de nouvelles pistes afin d’encore améliorer la formation en alternance sur les territoires de notre Région ?

[Intervention de Madame Emmery]

[Intervention de Monsieur De Bock]

M. Didier Gosuin, ministre.- L’enjeu de la formation en alternance est au cœur de nos stratégies et de la Stratégie 2025. De fait, l’ensemble du gouvernement, pas uniquement francophone, mais aussi régional, est conscient de la nécessité d’accroître la qualification de nos jeunes, de leur donner une chance d’expérience professionnelle et la possibilité de s’insérer sur le marché du travail.

Sans vouloir tout ramener à nous, nous constatons que, depuis quelque temps, il se passe quelque chose de vertueux à Bruxelles. Certes, la conjoncture économique s’est un peu améliorée, mais cette amélioration ne se concentre pas sur le territoire bruxellois, elle concerne l’ensemble du territoire. Or, les performances en Région bruxelloise sont assez étonnantes, de mois en mois, en termes de diminution du chômage et de remise au travail des jeunes.

Nous pensons que les hypothèses que nous avons posées et la stratégie que nous avons mise en place sont largement à l’origine de ces effets positifs. Ceci étant, nous ne sommes encore qu’au milieu du gué. Nous appliquons une nouvelle politique en matière de formation en alternance. Il ne vous aura pas échappé que nous devons la construire ensemble. Il y a un an, nous avons réuni un gouvernement tripartite francophone, et un gouvernement quadripartite, pour poser un certain nombre d’actes et prendre certaines décisions.

Sachez que nous remettrons bientôt cela, puisque dans la foulée, d’autres dispositions, d’autres engagements et d’autres négociations sont sur le point d’aboutir pour permettre une bonne interaction entre les institutions francophones. Nous savons que c’est aussi, hélas, l’une des difficultés qui pénalisent nos jeunes : nous avons des stratégies qui ne s’articulent pas, même si de part et d’autre, les objectifs sont les mêmes et sont positifs. C’est incontestablement un changement significatif, enregistré lors de cette législature.

Vous le savez, j’ai eu l’occasion de vous présenter après un an l’ensemble de la démarche de la Stratégie 2025 au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale le 26 mai dernier, en compagnie du ministre-président Rudi Vervoort.

Une focale complémentaire Commission communautaire française est la bienvenue, mais de nombreux projets transcendent les compétences des différents niveaux de pouvoir : c’est précisément l’intérêt de la Stratégie 2025. Je reviendrai donc, dans ma réponse, uniquement sur ceux qui se trouvent plus particulièrement dans le giron de nos compétences et je vous renvoie pour le reste à l’interpellation plus générale. Œuvrer de manière coordonnée au niveau régional a en effet également un impact sur les politiques menées à la Commission communautaire française, et vice versa.

En début de législature, nous avons immédiatement rencontré l’objectif 4 – renforcement des politiques croisées emploi-formation – et l’objectif 5 – renforcement de la formation professionnelle -, en investissant financièrement en masse dans la formation. De premiers résultats ont été engrangés, particulièrement pour les jeunes, puisque nous intégrons bien évidemment l’objectif 1 – garantie pour la jeunesse – en matière de formation en centres et en entreprises, ainsi que de stages.

Pour ce qui concerne les chercheurs d’emploi bruxellois de moins de 30 ans, les formations organisées par Bruxelles Formation et ses partenaires sont passées de 3.960 jeunes en 2014 à 4.455 jeunes en 2015. Le nombre de stages internationaux est passé de 102 à 139, celui des stages en entreprise de 649 à 931 et celui des formations professionnelles en entreprise de 778 à 840.

Comme vous le savez, nous avons obtenu de très bons taux d’insertion dans l’emploi : de 64% à 83 % des stagiaires dans les douze mois qui suivent le passage en entreprise, contre seulement 41,7% pour les jeunes n’ayant pas effectué de stage. J’aime rappeler ces chiffres ancrés dans la réalité pour ceux, de moins en moins nombreux, qui doutent encore de l’efficacité des stages et formations en entreprise.

Les formations en alternance, quant à elles, améliorent leur taux de réinscription, et donc d’accrochage, ce qui représente le principal défi à relever dans ce domaine. Comme nous nous sommes concentrés sur cet aspect, je reconnais et regrette que cela ne se soit pas encore traduit par une augmentation significative globale du nombre d’apprenants en formation en alternance, et particulièrement de jeunes.

J’en arrive aux réalisations concrètes parmi les nombreux chantiers que nous menons. Comme je l’ai dit, nous avons développé qualitativement et quantitativement l’offre de stages, de formations professionnelles individuelles en entreprises (FPI) et de premières expériences professionnelles. 

Les FPI à Bruxelles Formation sont passées de 1.385 en 2014 à 1.538 en 2015. Les stages de transition professionnelle (STE) ont touché 1.116 chercheurs d’emploi en 2015, contre 735 en 2014. Ces deux mesures correspondent à un investissement global de la part de Bruxelles Formation, donc de la Commission communautaire française, de 1.441.122 euros en 2015. Les comptes ayant été arrêtés, je peux me permettre d’être à ce point précis.

Parallèlement, les réglementations relatives à ces stages et formations ont, vous le savez, été révisées via l’adoption de l’ordonnance sur les stages, de l’arrêté organisant le futur stage de première expérience professionnelle (PEP) et de la révision du décret instituant Bruxelles Formation et de son arrêté d’exécution, qui précise notamment les modalités de mise en œuvre des FPI.

Lorsque nous prenons des décisions, leur mise en œuvre progresse de la même manière et au même rythme au parlement régional et dans cette assemblée, sans aucun décalage. C’est là un fait nouveau, même si vous pourrez toujours m’objecter que, s’il devait y avoir un décalage, j’en serais directement responsable puisque j’exerce les deux compétences. Cela démontre en tout cas l’utilité de lier étroitement les politiques de l’emploi et de la formation. Tout cela est à présent acquis et voté.

De plus, une réflexion de fond a été entamée avec les interlocuteurs sociaux. Le gouvernement se penchera d’ailleurs prochainement sur les propositions du groupe de travail dédié aux stages et piloté par le Conseil économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale (CESRBC). Nous voulons tous, concrètement, améliorer la portée, la visibilité et la régulation des stages proposés aux Bruxellois et aux entreprises bruxelloises. Ce travail permettra de poursuivre la clarification des cadres réglementaires relatifs aux stages existants dans la formation.

La validation des compétences en Région bruxelloise est repartie à la hausse en 2015, après plusieurs années de baisse. Le nombre de titres délivrés est passé de 712 à 1.071 entre 2014 et 2015. L’offre de métiers que l’on pourra valider augmentera de 30% en 2016, pour passer à 20 profils techniques différents.

Les objectifs qui visaient la production de 1.100 titres par an seront dépassés en 2016. L’utilisation des moyens les plus efficaces par les opérateurs et le volontarisme de ceux-ci ont permis ce premier résultat. De nouveaux moyens financiers ont été inscrits au budget. Ils permettront, dès 2016, de poursuivre cette progression. Nous visons à dépasser les 2.000 titres de compétences par an d’ici à 2020.

La Coordination bruxelloise de la validation des compétences, réunissant Bruxelles Formation, l’enseignement de promotion sociale et Service formation PME, bénéficie désormais, de manière effective, de la participation d’Actiris au Consortium de validation des compétences. Ainsi, nous avons inclus le partenaire régional dans une compétence communautaire, ce qui était indispensable.

Une note d’orientation stratégique sera soumise tout prochainement – encore avant l’été – aux gouvernements et, conformément à la Stratégie 2025, sera présentée au CESRBC élargi, avec définition précise des objectifs quantitatifs et qualitatifs, des budgets et des méthodes d’évaluation.

Conformément à la Stratégie 2025, la mobilisation des secteurs à Bruxelles s’est traduite par la création d’une fonction de facilitateur sectoriel au sein du CESRBC, afin d’assurer la mobilisation des acteurs sectoriels bruxellois, notamment à travers la conclusion de conventions-cadres avec les gouvernements bruxellois. La formation, la validation et l’enseignement, qui sont toutes des compétences de la Commission communautaire française, y seront pleinement intégrées.

Un inventaire des conventions sectorielles existantes, afin d’identifier les objectifs et chapitres des conventions-cadres, un plan d’action avec échéancier et priorités, la rédaction de conventions-cadres bruxelloises types et la mobilisation des secteurs prioritaires autour de tables rondes sont autant d’actions en cours.

La feuille de route pratique de la création de pôles formation-emploi a fait l’objet d’une note de cadrage sur les conditions de création de ces pôles, leurs missions et les projets en cours ou potentiels. Véritable vitrine d’un secteur d’activité pour les différents publics cibles – employeurs, chercheurs d’emploi avec une attention particulière pour les faiblement scolarisés, élèves, travailleurs en formation continue ou en reconversion, étudiants, formateurs et enseignants, grand public, médias, … – les pôles formation-emploi rassembleront en un seul lieu l’offre de formation la plus large possible liée à un domaine d’activité économique donné.

Ils seront équipés de matériel de pointe, mais poursuivront également d’autres missions telles que la mise à disposition d’équipements, l’identification et la validation des compétences, l’information et la sensibilisation aux métiers du secteur, des essais métiers, la veille sectorielle, ainsi que l’adéquation entre l’emploi et les stagiaires formés.

Parallèlement, la task force emploi-formation-enseignement-entreprises a été mise en place début 2015. Elle réunit tous les acteurs institutionnels et politiques bruxellois compétents en matière d’enseignement, de formation et d’emploi, y compris dans les volets communautaires, ainsi que les interlocuteurs sociaux concernés au premier chef par ces dossiers de priorité partagée de la Stratégie 2025.

Concrètement, six groupes de travail ont été constitués sur des chantiers spécifiques de la Stratégie 2025, caractérisés par la nécessité d’articuler emploi, formation et enseignement, et de reposer sur des engagements forts du monde de l’économie et de l’emploi. Ils ont d’ores et déjà contribué au rapprochement de tous ces acteurs par une meilleure connaissance, la production de priorités communes et l’encouragement au développement de projets communs.

La task force s’est réunie cinq fois depuis son lancement, le 21 janvier 2015. Comme vous le savez, elle n’est pas destinée à prendre des décisions finales, mais bien à instruire les chantiers et proposer des décisions aux gouvernements et aux interlocuteurs sociaux, dans une logique de la priorité partagée.

Sa dernière assemblée, le 19 mai dernier, a marqué un jalon dans son travail, puisque l’ensemble des chantiers a débouché sur des notes stratégiques à destination des gouvernements et des interlocuteurs sociaux, dans la perspective du Conseil économique et social élargi du 21 juin prochain. Je ne doute pas que je serai interpellé à nouveau à l’issue de ce dernier.

Outre les trois stratégies relevées ci-dessus, les chantiers prioritaires de la task force sont les suivants :

1. La réalisation d’une deuxième mouture du cadastre de l’offre bruxelloise francophone et néerlandophone d’enseignement, de formation et de validation. Un premier cadastre avait été produit en 2015, mais dans un domaine aussi fluctuant, celui-ci doit être remis en question annuellement pour voir les évolutions, provoquer les adaptations et ne pas se baser, comme souvent, sur des données dépassées.

2. Le développement de l’alternance à Bruxelles. J’y reviendrai plus loin.

3. La définition d’un plan quinquennal de l’offre de formation. Les objectifs opérationnels qui y sont repris se centrent tout particulièrement sur le plan pluriannuel chiffré d’adaptation qualitative, de développement quantitatif et de financement de l’offre de formation qualifiante. Ce plan quinquennal de formation sera soumis à la décision du gouvernement dans quinze jours. Sur ce plan aussi, nous aurons donc rencontré les objectifs.

Voilà autant de chantiers repris dans les dix-neuf programmes de l’Objectif 6 de la Stratégie 2025: le Programme bruxellois pour l’enseignement, piloté par la Région de Bruxelles-Capitale, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Commission communautaire flamande (Vlaamse Gemeenschapscommissie).

L’engagement des enseignants relève de la Fédération Wallonie-Bruxelles et nous pouvons l’encourager à travers des reprises de formations d’enseignants pour les chercheurs d’emploi. C’est l’un des points que je ne manquerai pas d’aborder avec la nouvelle ministre de l’Enseignement.

De manière générale, le recrutement de formateurs est un enjeu crucial pour la qualité de nos systèmes d’éducation et de formation, en ce compris dans les formations en alternance et autres formations professionnelles individuelles (FPI) ou stages pour lesquels nous encourageons la formation et l’accompagnement des tuteurs.

J’en viens à la formation en alternance. Je le rappelle, ce dispositif permet aux jeunes d’allier formation en centre et travail au sein d’une entreprise, selon des modalités clairement établies. Le symposium qui a été organisé par le palais royal et l’attention qui est prêtée par le roi à ce dispositif qu’est la formation des jeunes en alternance me permet de vous dresser le bilan des actions concrètes qui ont été réalisées et de celles que je compte encore mettre en œuvre.

Tous les partenaires présents lors de ce moment d’échange constatent que les avancées dans le secteur sont indéniables et que par ailleurs, d’autres chantiers sont encore à instruire. Le chantier est vaste et particulièrement important, mais nous avons réalisé, à Bruxelles, de nombreuses avancées. Force est de constater que cette expérience professionnelle couplée à une formation en centre permet, à terme, de valoriser une expérience professionnelle probante et de faciliter l’emploi.

Ce partenariat entre le monde de l’entreprise et de la formation professionnelle permet une adéquation plus fine des compétences attendues par les entreprises. Pour les apprenants, c’est l’occasion d’être plus réactifs et davantage formés aux nouvelles technologies utilisées au sein des entreprises. L’alternance, c’est aussi une plus grande opportunité de s’insérer durablement dans l’emploi en valorisant une expérience solide au sein du monde de l’entreprise.

Les derniers chiffres, qui résultent de l’étude Metices de novembre 2014, démontrent que, dans le dispositif d’apprentissage, on passe d’environ 28% de personnes en situation d’emploi, peu après la sortie du dispositif, à plus de 43%, un peu plus de trois ans plus tard. En ce qui concerne les auditeurs chefs d’entreprises, on passe d’environ 49% des personnes à l’emploi peu après la sortie à plus de 60% trois ans plus tard.

Permettez-moi de vous rappeler les 10 actions principales que nous avons déjà réalisées depuis le début de la législature. Celles-ci permettent des avancées majeures dans le développement de cette méthodologie spécifique de formation.

1. Mise en œuvre, avec la ministre de la Formation professionnelle de la Région wallonne et la ministre de l’Enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, du contrat d’alternance commun aux CEFA, à l’Institut wallon de formation en alternance et des indépendants et des petites et moyennes entreprises (IFAPME) et au Service formation PME (EFP) bruxellois en remplacement des deux conventions les plus utilisées actuellement pour les moins de 25 ans. Il y avait la convention d’insertion socioprofessionnelle (CISP) et le contrat d’apprentissage ; il n’y aura plus désormais qu’un contrat commun.

Depuis la rentrée de septembre 2015, l’utilisation d’un contrat d’alternance commun à tous les opérateurs formant des jeunes en alternance a produit tout d’abord une plus grande clarté pour les entreprises, une plus grande lisibilité pour les publics concernés ainsi qu’une simplification administrative bénéficiant à tous les acteurs. Depuis le mois de septembre 2015, 552 nouveaux contrats communs pour les jeunes en formation en apprentissage ont été signés.

2. Suppression des frais de dossier et droits d’enregistrement pour les patrons formateurs des petites et moyennes entreprises qui s’engagent dans les formations en alternance des futurs chefs d’entreprise. Cet exemple illustre ma volonté de simplifier les procédures administratives et de soutenir financièrement les employeurs qui s’engagent dans la formation de nos jeunes.

3. Une première diminution d’un tiers de la charge de travail des délégués à la tutelle en entreprise. Depuis la rentrée académique 2015, chacun d’entre eux a vu le nombre de jeunes dont il a la charge passer de 200 à 140. Nous poursuivrons dans cette voie.

Cette diminution a été permise grâce au soutien du Fonds social européen. Nous avons introduit, par exemple, un projet permettant de lutter contre le décrochage scolaire et l’abandon – problèmes majeurs en apprentissage – en permettant un meilleur accompagnement des jeunes, celuici passant par un renforcement significatif du nombre de délégués à la tutelle.

4. Des réformes de structure pour une simplification du paysage. Avec tous les partenaires francophones, nous avons créé l’Office francophone de la formation en alternance. Son fonctionnaire dirigeant a été désigné et son équipe, complétée. Cet organisme d’intérêt public est désormais opérationnel. Il a commencé ses travaux en octobre et il se réunit tous les mois depuis septembre.

Il sera le promoteur de la formation en alternance auprès des entreprises. Il soutiendra ceux qui souhaitent s’investir dans ces filières. Il centralisera les demandes des entrepreneurs en recherche d’apprentis, d’une part, et des apprentis en recherche d’un patron formateur, d’autre part.

5. Le gouvernement quadripartite a décidé de confier à l’Office francophone de la formation en alternance (OFFA) la gestion de tous les contrats d’apprentissage industriel (CAI) qui ont été communautarisés, en associant les partenaires sociaux de tous les fonds sectoriels concernés.

6. L’agrément des entreprises formatrices habilitées à former en alternance sera conjoint à travers une procédure commune aux opérateurs, pilotée par l’OFFA. Auparavant, les dispositifs variaient de secteur à secteur ; désormais, une seule procédure sera d’application dans tout l’espace francophone.

7. Le développement d’une formation commune à Bruxelles Formation, au Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (VDAB) et à Shop Manager, avec la Fédération belge du commerce et des services (Comeos).

8. L’investissement de 700.000 euros dans le réseau des centres de technologie avancée (CTA) et des futurs pôles de formation-emploi afin de développer leur ouverture aux apprenants en alternance, via l’équipement de ces centres en matériel de pointe.

9. L’ouverture au Service formation PME (SFPME) du dispositif de FormaForm, le centre de formation des formateurs commun au Forem, à Bruxelles Formation et à l’Institut wallon de formation en alternance et des indépendants et des petites et moyennes entreprises (IFAPME). Ici encore, la structure est à présent commune pour l’ensemble des formations.

10. L’élargissement au SFPME des certifications professionnelles de Bruxelles Formation, du Forem et de l’IFAPME. Le but est toujours de n’avoir plus qu’un seul type de certification pour la Wallonie et Bruxelles. 

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- On a voulu joindre les deux interpellations.

M. Didier Gosuin, ministre.- On me demande une évaluation de la Stratégie 2025. Il m’est difficile de la synthétiser davantage.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Moi, cela m’intéresse.

M. Didier Gosuin, ministre.- Je vous comprends, mais cela fait du bien de montrer qu’on a bien travaillé.

Malgré ces avancées considérables dans le champ de l’alternance, nous devons poursuivre nos efforts et notre volonté de permettre à ce dispositif qu’est l’alternance de retrouver ses lettres de noblesse et de ne plus être considéré, à tort, comme une filière de relégation. Il est plus qu’essentiel aujourd’hui d’œuvrer à la reconnaissance des intelligences multiples et à la valorisation des métiers techniques.

Dans la perspective d’une plus grande articulation entre l’enseignement, la formation et l’emploi et d’un renforcement de la formation, l’alternance fait partie des axes majeurs du gouvernement bruxellois.

Nous poursuivons plusieurs objectifs, dont la volonté de développer la formation en alternance en favorisant une simplification administrative et la refonte des soutiens aux entreprises, en référence à l’axe 2 de l’objectif 5 de la Stratégie 2025.

Voici les principaux chantiers en la matière, qui feront sans nul doute l’objet d’une prochaine évaluation en 2017.

1. La mise en œuvre du label « entreprise formatrice » qui permettra, à terme, d’être l’outil central de valorisation des employeurs qui s’engagent dans des dispositifs de formation en entreprise, particulièrement en alternance. Il favorisera la visibilité des entreprises dans leurs démarches formatrices. Cet outil permettra de créer une mobilisation, une émulation, et de simplifier les démarches administratives. Ce label offrira, par exemple, à terme, un accès privilégié et/ou une majoration à des aides en matière de formation (comme le tutorat), à des aides en matière d’emploi (comme J-30, le service link ou l’analyse des besoins), aux aides régionales d’expansion économique (à relier au volet emploi-formation du projet de nouvelle ordonnance « expa » que nous aurons certainement à traiter à la rentrée), à des formules d’accompagnement à la création ou au développement d’entreprises. Ces différentes possibilités sont à l’étude. Ce label sera un des leviers essentiels de développement du nombre et de la qualité de l’apprentissage en milieu de travail à Bruxelles et l’un des instruments du développement de l’emploi des Bruxellois.

Auparavant, chaque fois qu’une entreprise voulait un stagiaire, un dossier devait être introduit. Désormais, si vous disposez du label, on vous fait confiance et on vous envoie un jeune.

2. Le tuteur en entreprise joue un rôle essentiel dans la formation des jeunes apprenants dans l’entreprise. Nous souhaitons valoriser son implication et sa mission formatrice au sein des entreprises via des mécanismes de soutien financier. Depuis la rentrée de septembre 2015, des équipes mobiles du Service formation PME (SFPME) se rendent dans les entreprises afin de former les tuteurs aux compétences permettant de présenter les épreuves de certification et de validation des compétences. Nous travaillons à la mise en œuvre d’une réforme qui se fondera sur une simplification administrative pour les entreprises. Comme vous l’avez précisé, la Région wallonne a défini sa politique des incitants relatifs à l’alternance. À Bruxelles, nous instruisons différentes pistes qui permettront d’apporter un soutien aux entreprises qui s’engagent dans la formation de nos jeunes, tout en s’assurant qu’elles ne créent pas de complexités ou de difficultés administratives. Nous retrouverons ces mécanismes au niveau régional via la réforme des mécanismes d’aide à l’emploi. Je déposerai une note de principe sur la refonte de ces mécanismes, qui portent sur 153 millions d’euros par an.

3. Afin de développer l’alternance à Bruxelles et dans un souhait de travail articulé entre les opérateurs, je travaille au développement d’une cellule de prospection en entreprise qui sera installée début 2017 au sein de la future Cité des métiers. En septembre 2016, trois postes de prospecteurs seront opérationnels, avec pour objectif de sensibiliser l’ensemble des besoins des entreprises bruxelloises à ce dispositif d’alternance. Cette cellule sera articulée et prise en charge par l’instance bassin bruxellois et Tracé Brussel. 

Avec les deux opérateurs néerlandophones, elle sera également amenée à travailler de manière concertée avec Actiris, via un SPOC (single point of contact, point de contact unique), soit une unique porte d’entrée identifiée pour les contacts avec les entreprises, dispensant une information centralisée. 

4. Lutter contre le décrochage scolaire : le plan bruxellois de la garantie jeunes oeuvre pour favoriser l’accrochage des jeunes et leur permettre d’être d’une part, mieux orientés, mieux accompagnés dans la détermination de leur projet professionnel et d’autre part, de leur garantir une solution, qu’elle passe par l’emploi, l’entrée en formation ou un stage.

Nous devons également mobiliser toutes nos forces à l’orientation des jeunes vers l’apprentissage d’un métier qu’ils choisissent et qu’ils aiment. Des projets spécifiques ont été mis en œuvre depuis la rentrée de septembre 2015.

En formation en alternance à l’Espace formation PME (EFP), le taux de réinscription des jeunes a augmenté de 8% en apprentissage et de 2% en formation en entreprise entre 2014 et 2015. Cette augmentation est un signe positif de la dynamique des jeunes à poursuivre leur parcours de formation et à viser l’obtention d’une qualification. Par ailleurs, cela démontre également des signes de choix et d’orientation positive dans les formations. Cette lutte contre le décrochage, qui est un premier acquis, passe également par un renforcement de l’accompagnement des jeunes et une augmentation du nombre de délégués à la tutelle qui les encadrent.

5. Facilitation des passerelles et des liens entre les opérateurs de formations pour permettre aux personnes en formation de valoriser les compétences acquises et de favoriser la mobilité inter opérateurs. Nous devons inscrire l’alternance dans une stratégie intégrée de formation tout au long de la vie et la présenter comme un moyen parmi d’autres d’apprendre et d’acquérir de nouvelles compétences.

6. Nous allons multiplier l’offre de formation en alternance. L’objectif de développement de l’offre sera régulé par le plan quinquennal de formation. En effet, encore trop peu de jeunes se forment en alternance. En la matière, nous sommes ambitieux, puisque nous visons une augmentation de 800 places à l’horizon 2020.

7. Enfin, nous allons intensifier les collaborations et les partenariats à tous les niveaux entre le dispositif de formation des petites et moyennes entreprises et notamment, les collaborations entre l’EFP, Actiris et Bruxelles Formation.

Le grand chantier qui a retenu toute l’attention lors du symposium royal se centre sur la reconnaissance automatique des certifications et sur leur totale équivalence avec les titres délivrés par l’enseignement.

Nous ne pouvons plus accepter que les certifications basées sur des profils identiques ne génèrent pas des effets de droit semblable. J’en appelle d’ailleurs à toutes celles et tous ceux qui siègent au parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour revendiquer ensemble cette équivalence, car l’image que nous donnons aux jeunes qui suivent un enseignement d’alternance en ne leur accordant pas l’équivalence d’un diplôme discrédite une formation qui est pourtant essentielle. Il est temps de conquérir cette équivalence ! 

Au niveau bruxellois, je soutiens l’automatisation de la délivrance des certificats d’études de sixième année professionnelle pour l’ensemble des formations données au sein des centres de formation.

Je plaide également pour que l’ensemble des apprenants qui suivent une formation basée sur un profil, qu’il soit du Service francophone des métiers et des qualifications (SFMQ) ou non, soient assurés du même traitement. D’autant que les formations qui ne relèvent pas d’un profil SFMQ sont de toute façon basée sur des profils de l’enseignement.

Il me parait discriminatoire que des jeunes ne puissent pas prétendre à une certification égale, alors que la formation est basée sur les mêmes profils.

De plus, je souhaite que la reconnaissance des titres et diplômes soit automatique et qu’elle n’entraîne pas un grand nombre de vérifications et de lourdeurs administratives qui empêchent le bon fonctionnement du mécanisme. Une simplification des procédures est absolument essentielle pour permettre aux jeunes de valoriser leurs compétences et d’accéder de manière plus pérenne à un emploi ou à des formations complémentaires en vue de l’obtention du Certificat de l’enseignement secondaire supérieur (CESS).

Nous sommes convaincus qu’aujourd’hui à Bruxelles, nous devons centrer nos actions et orienter nos décisions pour permettre au maximum de jeunes d’atteindre les objectifs de certifications et de qualifications leur ouvrant le marché de l’emploi.

Nous ne pouvons plus accepter que certains jeunes soient pénalisés lorsqu’ils souhaitent changer d’opérateurs de formation.

Aujourd’hui, tant l’enseignement que la formation professionnelle en alternance ont fait leurs preuves. Les premières évaluations issues des diagnostics croisés sont plus que positives et permettent tant à l’enseignement qu’à la formation professionnelle de se parler, de se rencontrer et de certifier que le travail effectué chez les opérateurs est de qualité. C’est maintenant à nous, acteurs politiques, de dépasser les clivages historiques et d’oser favoriser l’employabilité des jeunes.

La formation en alternance évolue, et nous devons le faire avec elle. Nous devons lui donner une définition unique en Fédération Wallonie-Bruxelles afin que d’autres opérateurs puissent, en collaboration avec les acteurs historiques, se lancer dans cette aventure dont nous sommes les pionniers.

À nous de leur ouvrir la voie, mais dans le respect des règles fondamentales :

– l’articulation entre la formation en centre et l’apprentissage sur le lieu de travail dans un temps déterminé ;

– l’obtention d’une certification reconnaissant l’acquisition de compétences ;

– la contractualisation entre l’apprenant et l’employeur dont les modalités incontournables sont la rémunération de l’apprenant en fonction de son niveau de compétence, la dimension formatrice de l’entreprise par un tuteur désigné, la ventilation des compétences à acquérir entre l’opérateur et l’entreprise, et le suivi de l’apprenant dans sa formation en entreprise par un référent désigné par l’opérateur de formation.

Quid des acteurs locaux de formation et d’emploi ? Mme Emmery, c’est un chantier qui n’a pas été repris dans les priorités 2016, en accord avec les interlocuteurs sociaux. Cela ne signifie pas qu’il ne sera pas repris en 2017. Je n’ai pas le temps d’une longue réponse, mais il y a encore beaucoup de travail à réaliser en la matière.

Concernant la question sur l’outil d’anticipation, il a été confié à Actiris et au Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (VDAB) avec l’appui du bassin et donc de l’ensemble des partenaires flamands. Une analyse des secteurs et des métiers porteurs d’emplois a déjà été produite en 2015 et examinée dans le cadre de la récente task force. Elle guide les programmations de formation de Bruxelles Formation et, au travers des orientations du plan quinquennal, de l’ensemble des opérateurs de formation.

Cet outil est en train d’être complété par des analyses sectorielles ciblées visant à déterminer le niveau le plus pertinent d’analyse et surtout d’action. Nous testons d’ailleurs une nouvelle méthode de travail autour des tables rondes sectorielles (l’horeca le 14 juin prochain, et la construction bientôt), afin de partager et de discuter ces analyses avec les employeurs et les syndicats d’un même secteur.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Nous partageons le même intérêt pour ces questions. Ce fut peut-être une erreur de joindre les deux interpellations, vu l’étendue des points abordés.

Quoi qu’il en soit, nous avons reçu une première estimation des résultats engrangés, cela dans un contexte d’amélioration sur le front de l’emploi.

Vous avez pointé le problème de l’abandon dans le cadre des formations en alternance. Vous avez également annoncé le recrutement d’un nombre significatif de délégués à la tutelle. Combien sont-ils exactement ?

M. Didier Gosuin, ministre.- Nous en avons recruté trois, si ma mémoire est bonne, et nous comptons en recruter encore autant. Cette mesure a déjà donné des résultats positifs.

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CR n°34 (2015-2016), Juin 2016, pp. 22-29