Interpellation concernant l’installation de la Task Force opérationnelle « Emploi-Enseignement-Formation »

Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à M. Didier GOSUIN, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, chargé de l’Emploi et de l’Economie,

concernant « l’installation de la Task Force opérationnelle ‘Emploi – Enseignement – Formation' ».

M. Gaëtan Van Goidsenhoven.- Conformément aux objectifs de la déclaration de politique régionale, la Région bruxelloise s’est dotée il y a une dizaine de jours de sa task force opérationnelle Emploi-Enseignement-Formation. Partant, le Comité bruxellois de concertation économique et sociale (CBCES) – l’organe de concertation tripartite réunissant les partenaires sociaux et le gouvernement – s’est élargi aux ministres communautaires, pour définir et guider la mise en œuvre de l’alliance emploi-enseignement-formation.

Nous reconnaissons d’emblée que cette évolution structurelle est une avancée positive. En premier lieu parce que la coalition olivier n’y était tout simplement pas arrivée, mais surtout parce que la fédération des acteurs et la coordination des politiques sont cruciales pour gagner la bataille de l’emploi et soutenir la compétitivité de notre économie.

Toutefois, au-delà de l’accueil positif de la première rencontre organisée le mercredi 21 janvier, destinée essentiellement à acter l’installation de la plate-forme, il se pose un certain nombre de questions sur ce dossier.

L’accord de majorité précise ainsi que ladite task force devra « soumettre au gouvernement, pour la fin de l’année 2014, les fondements de cette alliance ». Sur le plan organisationnel, pourriezvous nous apporter un éclairage sur la composition exacte du CBCES élargi, ainsi que sur l’organisation de ses réunions ? Concrètement, qui sont les différents acteurs clés et comment vont-ils enfin mieux se parler et agencer leurs travaux ?

À ce propos, les quelques dépêches publiées dans la presse ont fait état de la présence d’Actiris, du VDAB, de Bruxelles Formation, des CPAS bruxellois, du Service formation PME (SFPME) ou encore d’impulse.brussels. Fort bien, mais il semble néanmoins que l’enseignement supérieur n’ait jamais été mentionné dans le cadre de cette grande concertation socio-économique. Est-ce un oubli des journalistes ?

Au niveau méthodologique, la task force travaille-t-elle sur la base de groupes de travail ? Le cas échéant, quel est leur nombre, ainsi que les thématiques visées ? Qu’en est-il de la coordination des travaux ?

Sur le plan des missions, ladite task force opérationnelle a été mandatée pour définir un plan d’action commun et de suivi de l’alliance emploi-enseignement-formation. Nous avons eu la confirmation d’objectifs portant notamment sur la réalisation d’un cadastre des formations, ou encore d’une évaluation des filières de formation à travers le prisme des fonctions critiques.

À nouveau, c’est fort bien, mais tant l’accord de majorité que les récentes annonces parues dans les médias ne font état d’aucun calendrier. Certes, nous pouvons comprendre la sagesse du ministre de ne pas s’engager dans des délais par trop irréalistes, mais face à l’urgence du chômage, nous serions rassurés de vous entendre sur un échéancier a minima d’un plan stratégique et de ses objectifs opérationnels.

Pourriez-vous nous donner des éclaircissements à ce sujet ?

Toujours à propos du plan, est-il prévu un mécanisme visant à l’évaluation permanente des résultats aux niveaux qualitatif et quantitatif ? Le cas échéant, qui en assurera le pilotage ?

Avez-vous décidé de tenir le parlement régulièrement informé des résultats ainsi obtenus ?

[Interpellation jointe de M. Paul Delva]

[Intervention de Mme Isabelle Emmery]

M. Didier Gosuin, ministre.- Vous avez raison de souligner que la task force est celle du Comité bruxellois de concertation économique et social élargi. Elle n’est donc pas une nouvelle structure, mais un outil simple qui constitue le bras armé du CBCES élargi. Elle l’alimente en propositions concrètes et relaye ses orientations pour permettre leur opérationnalisation par les différentes administrations et les acteurs de terrain concernés.

Il est prévu que le CBCES s’élargisse aux Communautés, en invitant les gouvernements de la Communauté flamande et de la Communauté française, les collèges de la Cocof et de la VGC, ainsi que le Collège réuni de la Cocom.

Quant à la représentation de l’enseignement supérieur au sein de la task force, elle inclut le président du nouveau pôle académique réunissant, côté francophone, les universités, les hautes écoles et l’enseignement de promotion sociale de niveau supérieur en Région bruxelloise. Si les informations diffusées dans la presse sont incomplètes, je n’en suis pas responsable.

Les partenaires flamands, représentés par leur ministre, seront associés plus directement en fonction des besoins au cours des travaux. Il nous faut en effet un équivalent du côté néerlandophone, et nous devons encore imaginer le moyen de le mettre en place. Néanmoins, le ministre et les administrations néerlandophones sont déjà représentés.

Le président du pôle, M. Viviers, a délégué dans la task force le professeur Pierre Desmarez, son conseiller aux relations avec l’enseignement secondaire et supérieur qui, outre cette fonction, est la cheville ouvrière des travaux académiques sur le suivi statistique des sortants de l’enseignement ou de la formation sur le marché du travail. La personne ad hoc, donc, dans la perspective d’articulation entre ces différents mondes.

Les réunions du CBCES élargi seront programmées dans les prochaines semaines, en concertation avec les interlocuteurs sociaux bruxellois auxquels il réserve, bien entendu, la primeur, afin de discuter des propositions opérationnelles préparées au sein de la task force.

Il s’agissait tout d’abord d’inaugurer symboliquement, avec les ministres compétents et leurs représentants, cette première en Région de Bruxelles-Capitale : une rencontre inédite entre les interlocuteurs sociaux et les ministres des Régions et des Communautés, en charge notamment de l’enseignement, soutenus par les administrations et les instances concernées.

Après cette réunion symbolique, la réunion s’est centrée sur la première mouture d’un texte sur les fondements de l’alliance emploi-formation-environnement, dont le premier axe est la stratégie 2025. Ces fondements vont reprendre les objectifs globaux de l’alliance, ainsi que sa méthode de production, d’opérationnalisation et d’évaluation. Il s’agissait donc de travailler concrètement autour d’une proposition de méthode de travail et d’objectifs à atteindre.

Les trois groupes de travail se penchent respectivement sur un cadastre de l’offre d’enseignement et de formation, sur un outil d’évaluation et d’anticipation des besoins du marché du travail et sur un instrument visant à faire correspondre les formations au marché de l’emploi.

Il s’agit de ne plus piloter les politiques à l’aveugle, même si en réalité, nombre d’outils existent déjà ou sont en passe d’être finalisés à l’Observatoire bruxellois de l’emploi, au service d’études de Bruxelles Formation, au Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (VDAB), ou sont en préparation au sein du bassin enseignement formation emploi qui se met en place la semaine prochaine. Ce sont tous ces outils que nous allons croiser, synthétiser, simplifier et opérationnaliser, afin de valoriser et approfondir ce qui existe déjà.

Les trois autres groupes de travail portent sur les conditions concrètes de développement :

– les stages ;

– la formation en alternance ;

– les pôles formation-emplois sectoriels, notamment à partir des centres de références existants.

Tous les partenaires présents autour de la table peuvent participer à tous ces groupes de travail. Leur composition a été arrêtée en présence de tous les représentants.

La task force ne limitera pas son travail à ces trois thématiques. D’autres pourront être proposées lors des prochaines réunions et faire l’objet de groupes de travail spécifiques, en fonction des besoins identifiés dans le cadre de l’alliance emploi-formation-enseignement de la stratégie 2025 et de l’ensemble de ses mesures. Ces trois thématiques constituent des leviers mobilisant particulièrement les secteurs et entreprises à activer en priorité.

Les partenaires sollicités ont manifesté un grand intérêt et étaient tous présents ou représentés. Il s’agissait des ministres-présidents de la Région de Bruxelles-Capitale, de la Communauté flamande, de la Cocof et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, des ministres de l’Enseignement francophone et néerlandophone, des représentants des travailleurs et des employeurs, ainsi que des fonctionnaires dirigeants des administrations et des acteurs opérationnels : Actiris, Bruxelles Formation, le VDAB, Bruxelles Économie et Emploi (BEE), Impulse, Service formation PME (SFPME), l’Instance régionale bassin enseignement qualifiant-formation-emploi, le Comité néerlandophone bruxellois pour l’emploi et la formation (BNCTO), l’enseignement néerlandophone de promotion sociale, les CPAS, la Fédération bruxelloise des organismes d’insertion socioprofessionnelle et d’économie sociale d’insertion (Febisp), l’Agence de développement territorial pour la Région de Bruxelles-Capitale (ADT) et l’Institut bruxellois de statistique et d’analyse (IBSA).

Durant ce premier semestre, les fondements, méthodes et objectifs finaux auront été finalisés par la task force sur la base du document de travail proposé lors de la première réunion. Pour juin, le texte de l’alliance portant sur les objectifs opérationnels traduit en plan d’action commun et de suivi sera finalisé par cette même task force pour être soumis au CBCES élargi.

Suivront l’opérationnalisation et la déclination propres à chaque Région et à chaque Communauté.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven.- Je vous remercie d’emblée pour les divers éclaircissements apportés sur le lancement de cette task force. Étant donné qu’elle vient de commencer, nous attendrons encore un peu pour l’évaluation.

Au-delà de l’optimisme prudent, je souhaiterais revenir sur quelques éléments complémentaires. En premier lieu, l’accord de majorité stipule que le gouvernement, je cite, « souhaite conclure prioritairement un accord de coopération avec les deux Communautés afin de mettre les politiques d’enseignement en concordance avec les politiques régionales ». Cet objectif figure-t-il au menu des travaux de la task force ? Le cas échéant, disposez-vous déjà d’un accord de principe de la part de vos homologues sur ce dossier ?

Le ministre-président avait également annoncé en juillet dernier que la task force soutiendrait le gouvernement dans l’adoption « d’un ambitieux Plan formation pour les infra-qualifiés » dont l’un des axes principaux concernera les projets de formation en alternance, en partenariat avec les entreprises de Bruxelles et des provinces de Brabant. Sauf erreur de ma part, ce point n’a pas été évoqué dans votre réponse. Pourriez-vous nous dire ce qu’il en est ? 

[Intervention de M. Paul Delva]

M. Didier Gosuin, ministre.- Un accord de coopération n’est pas une fin en soi. C’est un outil ! Et pour faire une loi ou un accord de coopération, il faut d’abord savoir ce qu’on va mettre dedans ! Or l’objectif du groupe de travail, c’est justement de savoir ce qu’on va mettre dedans !

Si, en réunissant l’ensemble des entités autour de la table, il appert que nous devons avancer dans une matière commune et que cela nécessite un accord de coopération, nous en ferons un. Mais il faut d’abord définir ce que nous voulons faire ensemble avant d’utiliser les outils, dont l’accord de coopération.

La déclaration ne dit pas que nous allons commencer par faire un accord de coopération. Elle dit que nous allons commencer par mettre sur pied une task force et débattre ensemble de tous les thèmes, dont celui que vous avez cité, M. Van Goidsenhoven. Lorsque nous aborderons ce thème, nous devrons sans doute conclure des accords de coopération, tant avec la Fédération Wallonie-Bruxelles qu’avec la Région flamande.

Mais nous n’en sommes pas encore là. Nous en sommes à la définition de la méthode de travail, aux objectifs, au choix des thématiques à creuser. Ensuite, nous verrons comment décliner ces objectifs. Les outils dont nous disposons sont, notamment, des modifications de loi, mais aussi des accords de coopération.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven.- Brièvement et sans esprit polémique, je n’ai fait qu’une lecture de l’accord de majorité. Il y est écrit que vous souhaitez conclure prioritairement un accord de coopération. Dont acte.

Nous attendrons donc le résultat.

 

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CRI COM (2014-2015) n°46, Février 2015, pp. 62-71