Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à Madame Céline FREMAULT, Ministre du Collège de la Commission communautaire française, en charge de l’Aide aux personnes handicapées, de l’Action sociale, de la Famille et des Relations internationales
concernant le Gouvernement thématique consacré au handicap
M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Mme la ministre, le 29 juin dernier, le Collège de la Commission communautaire française a tenu un Gouvernement thématique consacré à la Politique d’aide aux personnes handicapées. Au cours de cette réunion, à laquelle ont participé des associations et des acteurs de terrain bruxellois, vous avez pu faire le point sur plusieurs projets. Vous avez ainsi pu définir douze axes thématiques parmi lesquels une nouvelle politique d’handistreaming, l’accessibilité de l’information, la prise en charge d’enfants en bas âge, de jeunes en âge de scolarité, la Formation professionnelle, etc.
Bref, une politique qui implique la plupart des secteurs de compétence de notre institution… Nous pouvons regretter que nous ne soyons informés de ces rencontres manifestement fournies que par la presse. Je prends donc l’occasion de cette interpellation pour revenir sur ce programme assez chargé.
Vous avez adopté différentes mesures concrètes. Vous annoncez la création d’un nouveau centre de jour pour 25 enfants polyhandicapés non scolarisés à l’Institut royal pour sourds et aveugles (IRSA), à Uccle, pour un montant de 1,2 million d’euros par an. Pouvez-vous m’éclairer sur les modalités de la mise en œuvre de ce nouveau centre. Quel est le calendrier qui a été adopté ? Quand ce centre de jour sera-t-il inauguré ?
De manière plus globale, pouvez-vous faire le point sur votre ambition de créer 250 places à l’horizon 2020, sachant qu’il y avait, au 31 décembre 2015, plus de 300 personnes en situation de grande dépendance ? Quelles sont les pistes actuellement privilégiées pour répondre à cette très forte demande ?
Vous avez également annoncé des subventions à différentes associations destinées à soutenir des projets essentiels. Pouvez-vous m’indiquer les critères objectifs d’attribution de ces subventions, étant donné les nombreuses demandes qui vous sont certainement adressées ?
Dans le cadre du plan pluriannuel d’investissements, vous avez mentionné une aide pour le centre La Braise, situé à Anderlecht. Dans ce centre, qui accompagne notamment des personnes en grande dépendance, il est prévu d’assurer l’hébergement de quinze personnes. Quelles sont les implications financières de cette aide ? La Braise, on le sait, s’occupe essentiellement de personnes cérébrolésées.
Je souhaiterais également faire le point, avec vous, sur le handistreaming. Vous avez en effet annoncé l’adoption du décret en dernière lecture et il figure parmi les douze axes prioritaires que vous avez définis. Vous indiquez que ce plan sera élaboré en début de législature, avec une évaluation à mi-législature, et une autre, définitive, à la fin de ladite législature. Chaque ministre est par ailleurs invité à veiller à la réalisation d’objectifs stratégiques relevant de ses compétences. Pourriez-vous m’indiquer les actions précises qui seront entreprises dans ces domaines de compétences ? En termes d’évaluation, puisque vous envisagez cet exercice à mi-législature et en fin de législature, quels outils avez-vous élaborés pour effectuer une évaluation quantitative et qualitative du plan handistreaming ?
Enfin, en ce qui concerne l’amélioration de l’accessibilité de l’information, vous annoncez que des efforts ont été fournis et c’est évidemment important. Ainsi, le site internet du service Personne handicapée autonomie recherchée (Phare) verra son accessibilité améliorée. Mais vous mentionnez également la réorganisation du service Phare lui-même. Vos ambitions sont notamment d’améliorer la qualité du service rendu au public, de diminuer la durée des procédures ou d’augmenter le taux de réponses téléphoniques. Pourriez-vous préciser de quelles façons ces améliorations seront concrètement apportées ? S’agit-il de recruter des personnes spécialisées, de renforcer des effectifs ? Pouvez-vous par ailleurs m’indiquer les implications financières de ces améliorations, importantes et très attendues ?
[Intervention de Monsieur Uyttendaele]
[Intervention de Monsieur du Bus de Warnaffe]
[Intervention de Madame Geraerts]
Mme Céline Fremault, ministre.- Je vous remercie de votre interpellation relative au Gouvernement thématique consacré au handicap qui s’est tenu ce 29 juin 2016. L’initiative des Gouvernements thématiques, mise en place depuis plus d’un an au niveau de la Commission communautaire française, est extrêmement constructive puisqu’elle favorise les synergies entre les actions et les politiques menées par les différents ministres sur le territoire bruxellois.
Ce Gouvernement permet une collaboration soutenue afin de garantir l’inclusion des personnes en situation de handicap dans l’ensemble des domaines couverts par l’action publique. La transversalité des actions à mettre en œuvre est donc une condition indispensable en vue d’assurer la concrétisation de ce principe dans notre société. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai initié dès le début de la législature tout un travail sur la question du handistreaming à Bruxelles. La politique d’handistreaming a été adoptée en troisième et dernière lecture dans l’ensemble des Gouvernements assurant une application dans l’élaboration, l’exécution et l’évaluation des politiques menées. À la rentrée parlementaire, il vous sera loisible de vous pencher sur le texte qui reprendra les différentes étapes : présentation au sein des cabinets, présentation devant le Parlement, évaluation à mi-parcours et évaluation finale.
Pour évoquer les investissements, je dois d’abord rappeler que le Gouvernement francophone bruxellois a été fidèle à sa déclaration de politique générale. Il a ainsi trouvé les moyens budgétaires nécessaires, à concurrence de 4.900.000 euros de frais de fonctionnement annuels, pour ouvrir les projets de grande dépendance en cours, à savoir la Coupole de l’autisme avec quinze places de jour et de nuit, l’Hébergement occupationnel pour personnes polyhandicapées adultes (Hoppa) avec 25 places de jour et de nuit et, au cours de ce semestre, le Farra Méridien à Saint-Josse avec 33 places nouvelles, dont 25 places de jour.
Conscient du nombre important de demandes, le Gouvernement a également jeté les bases d’une nouvelle programmation pluriannuelle qui prévoit l’ouverture de places en centres de jour et d’hébergement, mais également en termes de service d’aide aux personnes et aux familles. Ce plan vise à créer à moyen terme environ 150 places complémentaires.
Au nom du Gouvernement francophone bruxellois, j’ai eu le plaisir de confirmer, le 29 juin, la concrétisation du premier projet prioritaire du plan d’investissement 2016-2020. Il s’agit du nouveau centre de jour pour enfants non scolarisés de l’IRSA, qui accueillera dès septembre 25 jeunes âgés de 6 à 20 ans, porteurs de déficience sensorielle (surdité et cécité) et en situation de grande dépendance.
Cette situation de grande dépendance nécessite un encadrement (en personnel et en infrastructures) spécifique et une approche éducative, psychosociale et paramédicale spécialisée. Ce centre bénéficiera d’une identité propre, mais tirera aussi profit de sa situation sur le site de l’IRSA en tissant des liens avec les autres départements du site. Cela permettra aussi de favoriser des situations d’inclusion par le biais d’activités extérieures avec les écoles. Le Gouvernement octroie donc l’agrément de ce centre, à partir du 1er septembre, pour des frais de fonctionnement de 1.200.000 euros par an.
L’autre projet novateur en cours est le futur centre d’hébergement et de jour de La Braise, à Anderlecht, pour quinze personnes. Il s’agira d’une première en Belgique puisque la personne avec cérébrolésion sera accueillie dans un hébergement adapté à sa situation et ne sera plus obligée de trouver une place dans des endroits de fortune où elle ne se sent pas la bienvenue. Le processus d’achat du terrain est en cours avec la commune d’Anderlecht, comme vous le savez. L’impact financier de cette construction est estimé à 2.200.000 euros pour les subsides en infrastructures et à 1.500.000 euros en frais de fonctionnement annuels récurrents.
Pour le processus de sélection des places à créer, le service Phare a adressé, en 2015, une circulaire à la direction des centres de jour, d’hébergement et d’accompagnement pour récolter les données en vue de la programmation. Le nombre de places à créer n’a donc fait l’objet d’aucune improvisation de notre part. Les réponses ont été rassemblées par le service Phare qui a agi de concert avec le service patrimoine, infrastructure et gestion des bâtiments de la Commission communautaire française. Ensuite, le Conseil consultatif, section personne handicapée, a remis un avis sur la programmation. Le soutien à des projets précis tient compte de la priorité des besoins, des moyens budgétaires et de l’état d’avancement des projets. Il est en effet fondamental de pouvoir soutenir des projets dont l’état d’avancement est suffisant pour qu’ils voient le jour très rapidement.
Le temps de la construction n’est cependant pas toujours en phase avec le temps des parents et des proches qui cherchent concrètement une place. Notre priorité reste donc d’en faire plus afin de résoudre des situations compliquées en termes d’accueil avec, dans certains centres, des troubles graves du comportement ou des situations de double diagnostic, ainsi que l’a expliqué M. du Bus de Warnaffe.
Pour les services d’accompagnement, le service Phare tient à jour la liste des demandes d’extension ou de nouveaux agréments. Une réunion d’échanges a lieu une fois par semaine entre les représentants des services d’accompagnement, le service Phare et les collaborateurs de mon cabinet.
Pour les nouveaux services, les subventions constituent souvent une porte d’entrée grâce à laquelle une association peut mûrir son projet avant un agrément définitif. Tel a été le cas cette année de l’association Vivre et grandir à Laeken. Depuis 2010, cette asbl a bénéficié de subsides dans le cadre du budget initiatives, avec au départ un cofinancement de Cap 48. Cette asbl a progressivement centré ses activités sur la seule mission d’accompagnement de jeunes à partir de douze ans.
Le projet a alors prouvé sa pertinence, dans un dispositif global qui a reçu un avis positif unanime du Conseil consultatif, et un agrément le 29 juin, avec entrée en vigueur au 1er juillet 2016.
Enfin, les subventions particulières aux associations non agréées, comme celles octroyées par Cap 48, font l’objet d’un comité de sélection bipartite désigné par Cap 48 et mon cabinet. Ainsi, nous avons décidé, en 2016, de cofinancer les projets suivants :
– le Projet Pil’enface avec l’école secondaire Ados Pilifs, un projet de préparation à la mise à l’emploi en entreprise de travail adapté (ETA) de jeunes autistes autour d’une activité de multiplication de plantes indigènes, pour 63.500 euros ;
– le projet des Jeunes aidants proches, qui a fait l’objet d’une attention particulière du Gouvernement, parce qu’il rassemble les réseaux santé et jeunesse, afin de sensibiliser les professionnels autour de cette question. Celle-ci a d’ailleurs été abordée récemment lors d’un Jeudi de l’hémicycle. Le projet est soutenu à hauteur de 20.000 euros ;
– le projet FratriHa, qui offre un soutien aux frères et sœurs de personnes présentant un handicap mental, y compris l’autisme, pour 17.500 euros. Ce sont les frères et sœurs de personnes handicapées elles-mêmes qui ont lancé cette association, de très jeunes personnes ;
– une subvention de 8.500 euros pour structurer la coopération de plates-formes de vieillissement des personnes handicapées.
Vous parliez aussi de Diversicom. Cette association avait reçu un subside d’impulsion lorsque j’étais ministre de l’Emploi. Elle voit aujourd’hui ses subventions pérennisées.
Effectivement dans la brochure, vous trouverez toute une série d’éléments. Toutefois, ce n’est qu’une brochure de présentation, même si elle a le mérite de présenter les initiatives prises et toute une série de projets nouveaux. Je songe à l’appel à projets d’un montant de 50.000 euros sur le handicap et le sport, qui a connu un grand succès.
C’est important de donner au secteur la possibilité de pouvoir entendre ce qui a été décidé, de discuter et débattre si nécessaire, et de repartir avec un outil pour comprendre la ligne et la stratégie de notre politique.
Concernant l’emploi, je ne vais pas avoir le temps de répondre à toutes les questions. Il y a de nombreux projets spécifiques.
L’accompagnement de la personne vieillissante, par exemple, fait l’objet d’un projet de 50.000 euros avec la Fédération bruxelloise des entreprises de travail adapté francophones (Febrap). Cette fédération a en outre reçu une subvention de 600.000 euros pour la modernisation des entreprises de travail adapté. Un travail a en effet été réalisé afin d’orienter les entreprises sur des marchés où elles sont susceptibles d’écouler leurs produits.
Par ailleurs, j’ai déjà répondu à plusieurs reprises à la question du taux d’emploi dans la fonction publique. Des quotas sont prévus. Il faut cependant savoir que beaucoup de personnes ne souhaitent pas déclarer leur handicap. Dès lors, il y a, à mon avis, plus de personnes handicapées au sein de la fonction publique que les chiffres ne le laissent penser.
C’est un sujet sur lequel j’ai beaucoup travaillé lorsque j’étais députée. Je vous invite à essayer de comprendre la faiblesse des taux. Des politiques spécifiques sont menées, notamment au niveau des ressources humaines, mais on ne peut forcer les personnes à déclarer leur handicap.
En ce qui concerne l’aide concrète aux familles, depuis deux ans, nous avons beaucoup développé la question du répit. Rien que pour l’autisme, on note le projet L’Intermède à Berchem, des services d’aide à domicile pour les cas plus lourds qui nécessitent des centres de nuit, mais aussi le service de proximité apporté aux familles.
L’appel à projets pour le projet Trône est en cours de rédaction pour définir celui-ci en concertation avec l’école. Cinq ou six acteurs seraient intéressés par une coopération. Il y a également un projet au niveau de l’école maternelle Decroly.
Depuis le début de la législature, j’invite chaque année les échevins en charge de la compétence du handicap au sein de mon cabinet. Certaines communes ont en effet des conseils consultatifs de la personne handicapée, d’autres pas, et certaines en ont mis en place depuis. Parfois, on rencontre aussi d’autres configurations des compétences échevinales. Ce que je veux, c’est surtout que s’opère un échange de pratiques. Je continuerai à avoir ce lien particulier avec les communes, notamment au travers de ces réunions au sein de mon cabinet.
L’évaluation est permanente. Tout un travail de recensement a été opéré pour estimer les besoins, notamment avec le service Phare.
Concernant la question scolaire, il ne m’appartient pas de faire cette recherche, dans la mesure où cette compétence dépend de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Je n’aurai pas vraiment répondu à l’ensemble de vos questions, tant le sujet est inépuisable, vu le nombre de ses enjeux. L’objectif du handistreaming est que vous ne soyez pas toujours face à la ministre en charge du handicap et que vous puissiez, dans chacune des commissions dans lesquelles vous siégez à la Région, en Commission communautaire française ou en Commission communautaire commune, interpeller le ministre en charge d’une compétence.
Dans ce cadre, quand vous aborderez la question de l’emploi, vous vous adresserez au ministre de l’Emploi. Pour un problème de mobilité, vous vous adresserez au ministre de la Mobilité, etc. C’est essentiel pour un travail le plus transversal possible. Chacun, dans ses matières, a une série de progrès urgents à faire.
M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Je remercie la ministre d’avoir longuement répondu. Ce sont effectivement des problématiques qui, de facto, ont des aspects extrêmement transversaux. Vous pouvez en tous cas compter sur nous pour également interpeller vos collègues et leur rappeler leur part de responsabilité dans l’aboutissement de ces objectifs importants.
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CR n°37 (2015-2016), Juillet 2016, pp. 35-