Question d’actualité de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à Monsieur Didier GOSUIN, Ministre du Collège de la Commission communautaire française, en charge de la Formation professionnelle,
concernant le phénomène du NEET à Bruxelles
M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Dans la presse de cette semaine, nous avons lu avec consternation qu’un jeune Bruxellois sur cinq et un jeune Wallon sur six appartiennent à la catégorie des Not in Education, Employment or Training (NEET), c’est-à-dire, un jeune se trouvant éloigné tant du monde de la formation et de l’enseignement que de celui de l’emploi.
Ce phénomène ne touche pas seulement notre Région, mais celle-ci est particulièrement touchée. La situation en Flandre et ailleurs en Europe n’est pas aussi mauvaise et l’on peut donc non seulement pointer ces chiffres, mais aussi s’en inquiéter et se préoccuper de l’avenir de ces jeunes.
La principale raison de cette situation réside dans la faiblesse du système éducatif francophone. On sait que le taux de redoublement y est particulièrement élevé et que beaucoup de jeunes quittent l’enseignement sans qualification et surtout sans avoir terminé leur cycle d’études.
Je voudrais vous entendre sur les actions conjointes que la Commission communautaire française souhaite mener avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour s’attaquer à ce problème qui touche les jeunes Wallons, mais aussi les jeunes Bruxellois.
Nous avons également lu aujourd’hui que vous pointiez avec une grande sévérité l’inaction de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Votre attitude répond déjà en partie à ma question puisqu’elle montre les difficultés que vous rencontrez pour coordonner vos actions avec celles de la Fédération.
Bref, l’heure de la mobilisation est venue, et je voudrais vous entendre sur les démarches que vous comptez entreprendre pour résoudre ce problème en concertation, espérons-le pour l’avenir, avec la Fédération Wallonie-Bruxelles.
[Question d’actualité jointe de Madame Emmery]
M. Didier Gosuin, ministre.- Je serai très clair : des études que l’on balance comme cela, avec des chiffres qui ne correspondent en rien à la réalité ni même à la définition d’un NEET, cela n’est pas sérieux. Il existe effectivement un phénomène de NEET qui concerne les jeunes qui ne sont plus soumis à l’enseignement obligatoire jusqu’à dix-huit ans. Avant cet âge, il existe des stratégies au niveau des Communautés. Je me souviens d’ailleurs, au début des années 2000, d’avoir participé en tant que bourgmestre et à l’initiative des deux Communautés, à la mise en place d’une banque de données et à l’obligation pour les communes de détecter et de suivre les familles qui ne respectaient pas l’obligation scolaire.
Aujourd’hui, ce mécanisme existe bel et bien. Parlons alors, s’il vous plaît, de ceux qui sont âgés de plus de dix-huit ans. Ils ne sont effectivement plus dans l’enseignement obligatoire, ils ne sont pas à l’emploi et ils ne sont pas en formation, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas inscrits chez Actiris. Ils ne constituent pas 20% à Bruxelles. En réalité, ceux que l’on reprend dans cette étude sont tous les jeunes qui sont bel et bien inscrits chez Actiris. Ce n’est donc pas correct et il faut resserrer le sujet. Certes, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problème. Il y a effectivement des jeunes qui sont volontairement NEET. On les trouve dans les familles bourgeoises – ils prennent une année sabbatique – ou il s’agit de jeunes que la société a exclus en les privant d’allocation d’insertion. Il est évident que ces jeunes-là ont de grands doutes quant à leur place dans la société.
Ainsi, ce mécanisme de rejet, adopté in tempore non suspecto, a effectivement entraîné l’émergence des NEET dans notre société. Je tiens à le rappeler car des politiques se cachent derrière ces décisions. Enfin, je voudrais dire que la problématique des jeunes non inscrits chez Actiris, qui ne sont pas à l’emploi et qui n’ont plus d’obligation scolaire au-delà de dix-huit ans, relève des compétences régionales. C’est à la Région qu’incombe la tâche d’aller rechercher ces jeunes.
Accessoirement, la Commission communautaire française finance Bruxelles-J, onze plates-formes physiques d’accueil de tous les jeunes. Un budget de 150.000 euros leur est d’ailleurs alloué à cet effet. Toutefois, il en va globalement de la compétence de la Région. Lorsque ces jeunes sont inscrits chez Actiris, ils suivent des formations et entrent ainsi dans le sillage de Bruxelles Formation. Nous ne mènerons pas, au niveau de la Commission communautaire française, un travail qui doit être normalement réalisé par la Région.
Hier, Mme Emmery m’a largement interpellé à ce sujet en commission, jusqu’à 21 heures…
M. Didier Gosuin, ministre.- Oui, d’accord. À cette occasion, j’ai décrit tous les devoirs de la Région – notamment lancer des projets pilotes – en la matière. Je vous renvoie donc à cette discussion au niveau régional.
M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Je prends bonne note de la réponse du ministre et de sa volonté de « modérer » le taux d’un jeune sur cinq de 18 à 24 ans concerné.
Pour le reste, j’entends que des actions doivent être menées au niveau de la Région. Néanmoins, je pense que la Commission communautaire française peut également actionner certains leviers. J’ai, par ailleurs, découvert ce matin la grande sévérité avec laquelle vous jugez la Fédération Wallonie-Bruxelles, mais vous n’avez pas dit un mot à ce sujet. Or, les responsabilités me semblent partagées.
M. Didier Gosuin, ministre.- Je constate, en Fédération Wallonie-Bruxelles, ce que je dis depuis vingt ans : il est effectivement inacceptable de voir des milliers de jeunes sortir de l’école à dix-huit ans sans qualification. Et une telle situation doit en effet interpeller le monde de l’enseignement. Oui, je le répète haut et fort !
M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- J’en prends bonne note. Vous avez également interpellé assez rudement le monde des entreprises.
Au-delà des actions à mener au niveau de la Région – et je vous ai bien compris sur ce point -, nous devons aussi actionner des leviers au niveau de la Commission communautaire française. L’enjeu est tel qu’une mobilisation générale de l’ensemble des institutions susceptibles d’intervenir est souhaitable.
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CR n°56 (2017-2018), Novembre 2017, pp. 22-23