Interpellation sur l’intégration de l’Institut Pierre Paulus au sein de la Commission communautaire française et les craintes des enseignants

Interpellation de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à Madame Fadila LAANAN, Ministre-Présidente du Collège de la Commission communautaire française, en charge du Budget, de l’Enseignement, du Transport scolaire, de l’Accueil de l’enfance, du Sport et de la Culture

concernant l’intégration de l’Institut Pierre Paulus au sein de la Commission communautaire française et les craintes des enseignants

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Au mois de novembre dernier, nous apprenions que l’Institut technique et professionnel Pierre Paulus, à Saint-Gilles, allait fermer ses portes. Il a également été annoncé que les élèves et les enseignants de cet institut seraient transférés à la Commission communautaire française. Il semble toutefois que cette transition ne se fasse pas sans difficultés, notamment dans le chef du corps enseignant. Ceux-ci dénoncent une absence de concertation avec les syndicats concernant la signature de l’accord-cadre relatif à la reprise de l’Institut Pierre Paulus.

Il est ainsi fait état d’une fusion administrative au 1er janvier 2017, c’est-à-dire qu’à partir de cette date, le personnel de l’institut passera sous statut Commission communautaire française. Et le personnel de l’Institut Pierre Paulus regrette, à la suite de ce transfert, la perte de toute l’ancienneté au sein de son pouvoir organisateur de Saint-Gilles. Cet élément constitue un souci majeur pour les membres du personnel.

Étant donné qu’une école à pédagogie active ouvrira ses portes dans les locaux actuels de l’Institut Pierre Paulus à la rentrée 2017-2018, ces enseignants aimeraient savoir pourquoi une priorité n’a pas été accordée aux enseignants de cours généraux de l’institut afin de les former à la pédagogie active. La réponse qui leur a été apportée précisait qu’ils pourraient postuler, mais qu’ils seraient considérés comme n’importe quel candidat, donc en concurrence avec d’autres postulants.

Parmi les éléments qui suscitent l’inquiétude, il est mentionné que certains professeurs de l’Institut Pierre Paulus perdraient leur ancienneté une fois intégrés à la Commission communautaire française, ancienneté qu’ils pourraient récupérer en 2018. La programmation de ces changements de statuts me semble incohérente et ne contribue pas à rassurer ces enseignants. Leur avenir professionnel ne semble pas garanti.

Un autre élément interpelle également : il est impossible de chiffrer le nombre d’élèves qui décideront de passer de l’Institut Pierre Paulus au Centre d’enseignement et de recherches des industries alimentaires et chimiques (CERIA). De fait, le nombre de professeurs qui doit être programmé pour assurer leur formation est également inconnu.

En résumé, c’est un sentiment d’inquiétude qui domine au sein des enseignants, lesquels regrettent également un manque de dialogue dans ce dossier.

Face à ces préoccupations et inquiétudes, j’ai des questions précises à vous soumettre. Au niveau des infrastructures, comment le CERIA pourra-t-il accueillir ces élèves supplémentaires dans ses classes ?

Quelles garanties avez-vous apportées au personnel de la Commission communautaire française en termes d’ancienneté ? Comment appréhendez-vous les conséquences de ce transfert pour les enseignants du CERIA, qui pourraient perdre leur emploi ? Quelle est votre position concernant une priorité accordée au personnel de l’Institut Pierre Paulus pour le nouvel établissement à pédagogie active qui ouvrira sur le site en 2017 ?

Quels contacts avez-vous pris avec votre collègue de la Fédération Wallonie-Bruxelles concernant les implications financières découlant de cette situation ? Mesurez-vous les conséquences pédagogiques pour les élèves qui suivent une formation professionnelle ?

Enfin, plusieurs voix s’élèvent concernant les conséquences de ce rapprochement, et notamment la possible dégradation de l’ambiance au sein de l’établissement. Quelles garanties pouvez-vous apporter à ce sujet ?

[Intervention de Monsieur Maron]

Mme Fadila Laanan, ministre-présidente.- Le Gouvernement francophone bruxellois a en effet décidé de reprendre l’Institut Pierre Paulus au 1er janvier 2017. Comme je l’ai déjà expliqué à tous les membres du personnel des Instituts Émile Gryzon et Redouté-Peiffer qui, pour répondre à la question de M. Maron, accueilleront quelque 250 élèves de l’Institut Pierre Paulus, une période de « standstill » est prévue jusqu’à la fin de l’année scolaire 2016-2017.

L’objectif est de ne pas perturber l’année scolaire en cours et d’effectuer le transfert de pouvoir organisateur dans les meilleures conditions possible. Durant cette période, aucune modification ne sera opérée en matière de personnel ou de déménagement.

Dès le mois de janvier dernier, un comité de pilotage et trois groupes de travail ont été créés pour assurer la mise en œuvre opérationnelle de la reprise et garantir un transfert optimal. Ces groupes de travail sont composés des deux administrations et établissements concernés, ainsi que des organisations syndicales pour le groupe de travail sur le personnel. Les deux autres groupes se consacrent, quant à eux, à la question des locaux, ainsi qu’aux aspects pédagogiques et administratifs.

C’est dire que nous travaillons dans la transparence et que nous encourageons la collaboration. Nous souhaitons évidemment que chaque partie prenante soit informée et puisse suivre l’évolution de la situation au fur et à mesure, mais aussi apporter les éclaircissements, avis et commentaires nécessaires pour que la collaboration et la reprise de l’Institut Pierre Paulus s’organisent de manière optimale.

S’agissant plus particulièrement du transfert du personnel, la réglementation en vigueur en matière de fusion sera appliquée. Ce transfert fera l’objet d’une convention qui sera concertée avec les partenaires sociaux. Le groupe de travail sur le personnel est chargé d’en rédiger un projet.

Concrètement, lors de la reprise de l’institut au 1er janvier 2017, tous les membres du personnel conserveront leur ancienneté, tant à l’Institut Pierre Paulus qu’à la Commission communautaire française. Cela signifie qu’ils poursuivront l’année en cours sans aucune modification de leurs attributions ou dans leurs désignations.

Ensuite, au 1er septembre 2017, lors de la fusion, les principes qui seront appliqués seront ceux des dispositions – articles 6 paragraphe 1er, 13bis et 13quinquies paragraphe 2 – de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 28 août 1995 réglementant la mise en disponibilité par défaut d’emploi, la réaffectation et l’octroi d’une subvention-traitement d’attente dans les enseignements secondaire ordinaire et spécialisé, secondaire artistique à horaire réduit, et artistique officiel subventionné.

Concrètement, pour ce qui concerne les enseignants nommés et pour la première année, un classement sera opéré sur la base de l’ancienneté par commune. Les enseignants de l’Institut Pierre Paulus viendront se classer après les enseignants des instituts Émile Gryzon et Redouté-Peiffer. Il y a donc une priorité pour les enseignants nommés de la Commission communautaire française. Cela étant, personne ne perdra son emploi. S’il y a moins de postes disponibles que d’enseignants, ils seront placés en commission de réaffectation. C’est la réglementation existante.

À partir de la deuxième année, pour les enseignants nommés des instituts Pierre Paulus, Émile Gryzon et Redouté-Peiffer, un classement sera fait sur la base de l’ancienneté uniquement, sans plus tenir compte du lieu de travail d’origine. Selon les estimations de mon administration, très peu d’enseignants de la Commission communautaire française pourraient être placés en commission de réaffectation.

Pour les enseignants temporaires prioritaires, ceux de l’Institut Pierre Paulus viendront directement s’intercaler selon leur ancienneté acquise à Saint-Gilles, avec ceux des instituts Émile Gryzon et Redouté-Peiffer. Les enseignants temporaires devront à nouveau postuler comme chaque année. Les règles habituelles d’ancienneté seront appliquées.

Autrement dit, seuls les enseignants temporaires prioritaires et prioritaires avec peu d’ancienneté pourraient ne pas être redésignés. Mon administration réalise actuellement des simulations afin de réduire au strict minimum les pertes d’emploi.

Il faut néanmoins souligner que la réglementation – et c’est la définition même de temporaire – dispose qu’ils doivent repostuler chaque année. Ils seront désignés en fonction des besoins et de leur ancienneté.

Par ailleurs, l’ouverture de la nouvelle école en 2018 générera de nouveaux emplois. Tous les enseignants de la Commission communautaire française qui rempliront les critères utiles pourront postuler. Il s’agit d’une réelle ouverture d’emplois et d’un véritable défi pédagogique.

Le groupe de travail qui se consacre à l’infrastructure a été chargé d’établir la liste des besoins en termes de locaux pour accueillir l’Institut Pierre Paulus. Les élèves de plein exercice seront intégrés sur le site du CERIA, au sein des instituts Redouté-Peiffer et Émile Gryzon. En ce qui concerne les élèves du CEFA, des concertations sont en cours pour les accueillir sur le site de l’Espace formation PME (EFP).

Le troisième groupe travaille sur les aspects pédagogiques et administratifs de la fusion. C’est au sein de ce groupe que sont évaluées les éventuelles conséquences pédagogiques pour les élèves, afin d’y apporter la meilleure réponse possible. Mon administration travaille en bonne intelligence avec la commune de Saint-Gilles, afin que les élèves ne subissent aucun changement entre le 31 décembre 2016 et le 1er janvier 2017. Ce groupe est chargé de travailler sur une série de dossiers comme le règlement d’ordre intérieur, les grilles horaires et le règlement des études.

En termes de communication, plusieurs actions à destination du personnel, des élèves et des parents sont prévues dans le courant des mois de mai et juin 2016. Plusieurs actions sont prévues.

Tout d’abord, une communication écrite et conjointe avec la commune de Saint-Gilles est prévue dans tous les prochains jours pour les membres du personnel. Elle concernera les étapes à suivre et le calendrier du transfert. Ensuite, une information sera diffusée aux élèves et à leurs parents quant à la reprise de l’Institut Pierre Paulus et à sa migration vers le site du CERIA.

Il s’agit d’informations et de documents communiqués actuellement, mais nous avons déjà eu l’occasion de les informer, notamment par le biais de l’échevinat de Saint-Gilles, qui a organisé plusieurs réunions avec les membres de la direction de l’Institut Pierre Paulus, les professeurs et les parents. Il s’agit donc simplement ici de préciser le calendrier du transfert.

Au niveau de ce calendrier, il est prévu que mon administration termine le projet de convention pour le mois de juin 2016. Cette convention sera alors concertée avec les organisations syndicales à la rentrée scolaire.

Quant à votre question relative à la priorité accordée au personnel de l’Institut Pierre Paulus au sein du nouvel établissement à pédagogie active, il appartient à la commune de Saint-Gilles d’y répondre.

Pour ce qui concerne les contacts, mon administration a déjà eu plusieurs échanges avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et le Conseil des pouvoirs organisateurs de l’enseignement officiel neutre subventionné (CPEONS) pour avoir des précisions sur des dispositions de la réglementation sur les transferts et fusions des établissements.

Enfin, vous me demandez quelles sont les garanties que je peux apporter au sujet de l’ambiance qui pourrait se dégrader. Sachez que je mets tout en œuvre pour que la Commission communautaire française offre un enseignement de qualité aux élèves. Les directions et mon administration travaillent en ce sens, afin d’accueillir les nouveaux élèves et enseignants le mieux possible.

Pour ce qui relève des sections, nous avons maintenu celles qui étaient complémentaires aux options que nous avons déjà en charge et qui pouvaient être immédiatement opérationnelles.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- J’ai entendu ce que la ministre-présidente avait à nous dire aujourd’hui : des comités de pilotage semblent travailler pour assurer l’intégration de l’Institut Pierre Paulus au sein de la Commission communautaire française.

Toutefois, cette réponse ne me rassure pas complètement et je pense qu’il en ira de même pour les enseignants de l’actuel Institut Pierre Paulus. J’ai bien compris que des dispositions étaient prises, mais j’ai aussi pointé une phrase qui m’inquiète un peu : il y aurait une volonté de réduire au strict minimum les pertes d’emploi. Cela signifie qu’il y aura néanmoins quelques dégâts.

Un groupe de travail plancherait en outre sur les aspects pédagogiques afin de trouver les meilleures solutions, mais cela reste assez flou à ce stade.

Quant à la communication, jugée gravement déficiente, j’entends bien qu’elle évoluera vers une communication écrite, mais cette volonté démontre précisément le manque de proactivité qui a prévalu jusqu’à présent en la matière. On souhaite certes faire face aux traumatismes et aux inquiétudes, mais je crains malheureusement que l’on s’y prenne un peu tard et que l’on parvienne tout au plus à limiter les dégâts.

Nous suivrons évidemment ce dossier avec attention. À mon sens, ce qui nous a été dit ce matin n’est pas de nature à rassurer pleinement le corps enseignant, ni d’ailleurs les étudiants. Il importe vraiment, Madame la ministre-présidente, que votre administration et votre cabinet prennent ce dossier à bras le corps.

Mme Fadila Laanan, ministre-présidente.– J’ai dit que nous collaborions en toute transparence sur ce transfert, et vous semblez croire que nous ne faisons rien. Nous avons créé des groupes de travail et associé toutes les personnes concernées.

Mon cabinet ne dort pas !

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Je n’ai jamais dit cela, mais vous minimisez les traumatismes causés par ce transfert.

Mme Fadila Laanan, ministre-présidente.- Vous dramatisez la situation. Tout est fait en parfaite synergie. La fermeture de l’Institut Pierre Paulus aurait généré de grosses pertes d’emplois. Le transfert permet de récupérer les professeurs et les enseignants, et vous nous dites que nous ne faisons rien.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- J’ai manifestement mis le doigt sur un point sensible. Je doute que le corps enseignant et les étudiants partagent votre satisfaction. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Pour retrouver le texte dans son intégralité, cliquez ici.
CR n°32 (2015-2016), Avril 2016, pp. 5-7