Question orale sur la noyade à la piscine du CERIA

Question orale jointe de Monsieur Gaëtan VAN GOIDSENHOVEN, Député, adressée à Madame Fadila LAANAN, Ministre-Présidente en charge de l’Enseignement

concernant la noyade à la piscine du CERIA

 

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Depuis longtemps et pour la plupart des cas, les dispositifs de sécurité anti-noyade dans les piscines, qu’elles soient privées ou publiques, ont pour but principal de garantir la sécurité des plus petits dans les bassins. Le tragique accident qui a coûté la vie à un étudiant de dix-neuf ans à la piscine du CERIA, le mardi 1er novembre, doit nous pousser à approfondir la réflexion et, à tout le moins, à étendre et à renforcer ces dispositifs, sans égard pour l’âge du public auquel ils se destinent.

On pourrait penser qu’un étudiant de deuxième année en éducation physique n’est pas a priori le public que l’on voudrait cibler en installant de tels dispositifs dans les piscines publiques et que, pour les cas rares de malaise soudain, d’accident ou de perte de conscience subite par exemple, des maîtres-nageurs veillent constamment.

Sans pour autant remettre en cause la prévoyance ou la prévention mise en œuvre sur les lieux, ce drame me pousse à vous interroger sur les circonstances qui ont entouré l’accident et sur les mesures que nous devons étendre, afin d’éviter que pareil drame ne se reproduise.

Quelles sont donc les mesures qui ont été prises pour l’installation obligatoire et homologuée d’alarmes sonores et de caméras dans les bassins publics ?

Quelle place accordez-vous à la prévention en la matière ? Quel regard portez-vous sur le scénario d’une campagne d’information qui, tout en appelant à la vigilance de tous dans les lieux de baignade, reprendrait les gestes et réflexes qui sauvent lors d’accidents ? 

Mme Fadila Laanan, ministre-présidente.- Vous m’interrogez sur les circonstances d’un événement absolument dramatique que j’aurais préféré ne jamais rencontrer dans ma vie professionnelle. L’accident a eu lieu le samedi 29 octobre et la victime est décédée le mardi 1er novembre. Ce jeune étudiant en kinésithérapie de dix-neuf ans effectuait, seul, des exercices d’apnée statique. Cet élément a été confirmé par les pompiers. Or, la pratique de l’apnée statique, lorsqu’elle est autorisée, doit toujours être effectuée en binôme ; en aucun cas, elle ne peut s’effectuer seule, sans surveillance spécifique.

Au moment de l’accident, deux sauveteurs étaient présents. C’est l’un d’entre eux qui a signalé la victime et enclenché la procédure de sauvetage. Dans l’attente des secours, les sauveteurs ont utilisé l’oxygène et le défibrillateur et ont procédé à un massage cardiaque.

Ce grave accident nous oblige évidemment à questionner nos procédures de prévention. Une réunion a été organisée le 9 novembre en présence du responsable de la piscine, des sauveteurs et de la conseillère en prévention et sécurité de la Commission communautaire française pour un débriefing sur l’accident.

Plusieurs décisions ont été prises. D’abord, bien qu’il n’y ait pas d’obligation en la matière, il a été procédé à l’installation d’un système de vidéo-détection assistée par ordinateur. Différents systèmes existent : certains sont équipés uniquement de caméras subaquatiques, mais semblent produire trop de fausses alertes, tandis que d’autres, plus performants, comprennent à la fois des caméras aériennes et subaquatiques, permettant de détecter un corps immergé et sans mouvement et d’en alerter les maîtres-nageurs.

Ensuite, l’interdiction totale de l’apnée statique a été inscrite dans le règlement d’ordre intérieur de la piscine du complexe sportif. Elle est communiquée par une campagne d’affichage dans les vestiaires et dans la piscine pour la rappeler de manière visible à tous les baigneurs.

En parallèle, le service interne de prévention et Arista ont été mis à la disposition des agents affectés par le drame pour les aider à affronter ce moment difficile. Le Parquet a proposé de classer le dossier sans suite.

Monsieur Van Goidsenhoven, j’en viens aux questions plus spécifiques que vous me posez, ayant trait à la place que j’accorde à la prévention en général.

Pour moi, la sécurité et, donc, son anticipation qu’est la prévention, constituent une priorité absolue dans la gestion des piscines, infrastructures sociales, sportives, culturelles ou scolaires. Elles doivent toujours passer avant toute autre considération pour tout employeur.

Cela dit, dans certains cas, vouloir informer en amont pour augmenter les chances de sauver en aval peut induire des comportements inadéquats, voire dangereux. Il faut en effet être valablement formé aux premiers secours pour les mettre en œuvre. Donc, une campagne de sensibilisation qui, tout en appelant à la vigilance de tous dans les lieux de baignade – piscines, lacs, rivières et mers -, reprendrait les gestes et réflexes qui sauvent, si elle me paraît intéressante, devrait s’adresser à des profanes et viser des gestes et réflexes qu’ils peuvent accomplir sans danger et sans formation particulière. J’imagine qu’une telle réflexion pourrait être menée avec des organismes spécialisés dans ce type de communication.

Il me semble, par ailleurs, qu’en tant qu’employeur public, nous devons également miser sur une gestion professionnelle de tous ces risques, et ne pas nous défausser sur les individus d’une responsabilité qui nous incombe. 

M. Emmanuel De Bock (DéFI).- À la suite de la demande du dirigeant de la piscine, certaines décisions ont été prises, notamment l’installation d’un système de vidéo-détection. S’agit-il du système qui a été demandé ?

Mme Fadila Laanan, ministre-présidente.- Il n’est pas encore installé, mais la décision a été prise.

M. Emmanuel De Bock (DéFI).- C’est important. Je vous remercie d’avoir tiré parti de ces malheureuses circonstances qui constituent un véritable problème pour les gestionnaires de piscine et pour ceux qui en assument la responsabilité politique. Il faut mettre tout en œuvre pour diminuer le risque – même si le risque zéro n’existe pas – et pour offrir les meilleures conditions d’utilisation et d’exploitation de pareils lieux.

Quant à l’interdiction de faire de l’apnée statique, je lui préfère la responsabilisation à l’égard de cette pratique qui doit être effectuée en binôme. Plutôt que de l’interdire, il convient probablement de l’encourager dans des clubs ou de la laisser pratiquer sous surveillance, ne fût-ce qu’en alertant le maître-nageur de la tenue de tels exercices. À défaut, je crains que les nageurs ne s’y adonnent malgré tout ou trouvent d’autres lieux pour le faire. La victime venait, semble-t-il, tôt à la piscine pour faire ces entraînements. Alors ne faut-il tolérer ces exercices qu’en club ? C’est aussi une piste.

La prévention étant essentielle, je suis rassuré par votre réponse et ne peux que vous encourager à avertir les autres piscines de ces accidents malheureux.

M. Gaëtan Van Goidsenhoven (MR).- Je m’associe à la première question de mon collègue concernant les dispositifs techniques. Pour le reste, pareil incident doit nous amener à nous reposer toujours les mêmes questions. Même là où la vigilance est la plus importante, des améliorations et des remises en question sont toujours possibles. Dans le cas présent, la prudence n’a vraisemblablement pas été suffisamment de mise, ce qui est à l’origine de cet épouvantable drame.

Cela nous rappelle qu’il nous faut aussi progresser en termes de sensibilisation et de responsabilisation des uns et des autres. On peut évidemment compter sur le personnel pour secourir, mais certains gestes sont à éviter si l’on ne veut pas se mettre soi-même en danger.

 

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BIQ n°11 (2016-2017), Décembre 2016, pp. 11-12